lundi 23 mars 2015

Dictionnaire entièrement québécois ou dictionnaire adapté ?


Dans la dernière Infolettre Usito, on reprend une nouvelle fois la ritournelle suivante :

Entièrement conçu au Québec, Usito est le premier dictionnaire électronique à décrire le français standard en usage au Québec, tout en faisant le pont avec le reste de la francophonie.


Entièrement conçu au Québec ?


Je répète ce que j’ai écrit le 8 janvier 2013 à propos de ce qui s’appelait alors le Franqus et qui est depuis devenu Usito :

Il est faux d’affirmer que « toutes les définitions et le contenu sont de nous. On est parti de zéro» (Le Devoir, 29 mars 2008) ; ou encore que « toutes les définitions sont de notre cru, nous n’avons rien emprunté aux autres dictionnaires » (Le Devoir, 29 septembre 2012). Plusieurs définitions sont au contraire reprises telles quelles du Trésor de la langue française de Nancy ou du Grand Dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française : d’ailleurs, le Franqus a l’habitude de le signaler en faisant suivre les définitions concernées des sigles TLFi ou GDT. Alors pourquoi affirmer le contraire dans les médias ? (En deçà des promesses / 12 : bilan de mon analyse)



Depuis, Claude Poirier, ancien directeur du Trésor de la langue française au Québec (Université Laval), a publié sa propre analyse d’Usito. On y lit entre autres :

USITO n’a pas été construit à partir d’une documentation ni d’une expertise entièrement québécoises. Pour l’établissement de la nomenclature, on a tiré parti de la BDTS, du DFP et du Dictionnaire québécois d’aujourd’hui (DQA), mais aussi des dictionnaires français. Pour le traitement des mots communs aux Français et aux Québécois, les auteurs ont pu exploiter les définitions et les rubriques étymologiques du TLF, grand dictionnaire de France, ainsi que la riche base textuelle Frantext, à la suite d’une entente avec l’ATILF, unité de recherche du Centre national de la recherche scientifique basée à l’Université de Lorraine (Nancy). Pour la révision des articles, USITO a bénéficié en outre de la collaboration de plusieurs excellents chercheurs d’Europe. Sans l’avouer clairement, les auteurs se sont manifestement inspirés aussi du Petit Robert.
[…]
Les auteurs d’USITO ont minimisé leur dette à l’égard du TLF en déclarant n’avoir exploité que « certaines définitions » du dictionnaire français (voir, sur le site d’USITO, la rubrique consacrée aux contributeurs à leur dictionnaire). Or, une comparaison des articles fait voir qu’USITO ne livre généralement pas une analyse originale du vocabulaire, surtout dans le cas des mots complexes, mais reprend les structures sémantiques du TLF ou du Petit Robert.


Claude Poirier est clair : USITO n’a pas été construit à partir d’une documentation ni d’une expertise entièrement québécoises.


Pour lire l’analyse complète de Claude Poirier, cliquer ici.


dimanche 22 mars 2015

Passacaille


Cet après-midi avait lieu au Palais Montcalm de Québec un concert-hommage à l’abbé Antoine Bouchard. Quel est le lien avec ce blog, me direz-vous ? Aucun. Sinon que l’abbé Bouchard m’a enseigné en Éléments latins et que son frère, l’abbé Pierre, m’a enseigné l’histoire de la musique.

Autre hommage à venir, le dimanche 19 avril à La Pocatière :



Antoine Bouchard a enregistré l’intégrale de l’œuvre pour orgue de Pachelbel.




vendredi 20 mars 2015

mercredi 18 mars 2015

À la queue du progrès


Vidéo montrant qu’Usito et le Grand Dictionnaire terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française (OQLF) sont en retard d’une révolution technologique :



mardi 17 mars 2015

Comment sortir du bois ?

 
Sapin (Picea abies) tordu et couché par la bise, Genève (Bois de la Bâtie),
Photographe: MHM-com Source : Wikipédia


Parmi les quatre fiches que le Grand Dictionnaire terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française (OQLF) met en vedette ces jours-ci, il y a la fiche « volis » : « partie du tronc rompu d’un arbre qui est tombée au sol ». Comparons avec la définition du Trésor de la langue française informatisé (TLFi) : « Partie de la tige d'un arbre brisé qui est tombée au sol ». Si je m’imagine facilement une partie de tige tombée au sol, ou encore un arbre brisé dont la cime touche le sol, j’ai plus de difficulté à me représenter un tronc rompu gisant au sol. Partie du tronc, partie de la tige, est-ce donc la même chose ?


Pour le TLFi, le tronc est la « partie d'un arbre comprise entre les racines et la naissance des branches maîtresses, constituée de tissus ligneux au centre (cœur) et de tissus mous à l'extérieur (écorce). »


Pour le Larousse en ligne, le tronc est la « tige principale d’un arbre, depuis les racines jusqu’à la naissance des grosses branches ».


La fiche « tronc » (domaine : sylviculture, exploitation forestière) de la banque de données terminologiques Termium du Bureau de la traduction (Ottawa) définit ainsi le tronc : « Partie de la tige que l'on peut affecter à des emplois nobles, par exemple la menuiserie et l'ébénisterie ». Cette définition a été normalisée par l’AFNOR, ce que se garde bien de nous dire le GDT.

  
Quant à lui, le GDT donne la définition suivante : « tige principale et lignifiée de l’arbre, située entre les racines et la cime ». Curieuse définition. D'où peut-elle venir ?


Pour tirer les choses au clair, voyons la définition de tige en français standard.


Pour le TLFi, la tige est la « partie des plantes vasculaires généralement aérienne et très variable dans ses dimensions, sa direction, sa forme, qui porte les feuilles et les organes reproducteurs et qui conduit la sève entre les racines et les feuilles. » Ce qui correspond à la définition de… tronc dans le GDT : « tige principale et lignifiée de l’arbre, située entre les racines et la cime ». Ou comme le dit le Webster (s.v. trunk) : « the thick main stem of a tree ».


Pourquoi se compliquer la vie avec d’absurdes distinctions sémantiques quand il est si facile de dire que trunk se traduit par tronc ? Ainsi va l’endogénisation de la langue.


En conclusion, voici la définition de Wikipédia, qui permet de clarifier les choses :

Un volis est un arbre brisé sous l'action d'effets naturels (vent, foudre, neige, chute d'un autre arbre) ou pour des raisons qui lui sont propres (vieillesse, pourriture), sans intervention de l'homme. Parfois le terme de volis désigne seulement la cime d'un arbre qui a été rompue et enlevée par le vent.
Si l'arbre est déraciné, on utilise le terme de chablis.

lundi 16 mars 2015

In memoriam William F. Mackey (1918-2015)




Notes biographiques : L’écologie des langues, Mélanges William Mackey / Ecology of Languages, Homage to William Mackey, Paris, L’Harmattan, 2002, pp. 13-16 ; bibliographie choisie, pp. 17-21. Bibliographie en ligne: cliquer ici.


jeudi 12 mars 2015

Micmac chez les Inuit(s)


Autres perles de la dernière livraison de l’Infolettre Usito. Cette fois, elles proviennent de l’article consacré aux emprunts lexicaux faits à la langue inuktitut.


Extrait : « […] le mot inukshut, qui veut dire ‘ qui peut remplacer un être humain ’, et qui désigne cet amoncellement de pierre, imitant un être humain, qui sert de repère en territoire inuit. » En français standard en usage ailleurs que chez Usito, dans ce genre de formulation, on emploie plutôt l’article défini. Mais il est vrai qu’en anglais, c’est le démonstratif que l’on utilise. La formulation de l’Infolettre est donc un calque syntaxique.


Autre extrait : « Depuis 1970, l’appellation inuit désigne officiellement au Canada le peuple que nous appelions auparavant Esquimau. » Faut-il comprendre qu’en changeant d’appellation en français, les aborigènes du Grand Nord n’ont plus droit à la majuscule initiale ?


mercredi 11 mars 2015

Allons à la cabane !


Nouvelle livraison de l’Infolettre Usito, nouvelles perles.

D’abord dans le courriel expédié par l'éditeur, cette accroche pour l’article sur les érablières : « Des petits pains envoyés en France comme objet de curiosité à l’attirail moderne de nos acériculteurs. » On notera l’absence d’accord. Et on peut se demander s’il est approprié d’appeler attirail l’équipement des acériculteurs. Mais passons, il y a mieux à voir.

Dans le français standard en usage chez Usito, le mot chaudière signifie seau : « Ce n’est qu’au milieu du 19e siècle que s’instaurent les pratiques modernes de récolte de l’eau d’érable avec chalumeau et chaudière de fer blanc […] ».


Mais que dit le Grand Dictionnaire terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française (OQLF) ? Surprise ! Dans le français standard en usage au GDT, seau est un québécisme :

 
Extrait de la fiche « seau » du GDT

Et encore cette perle de l’Infolettre : « Le feu de bois extérieur, où [sic] l’on faisait bouillir l’eau d’érable, est remplacé par une grande bouilloire placée à l’intérieur d’une construction rustique, la cabane à sucre, et les parties de sucre en famille annoncent l’arrivée du printemps. » Le feu de bois est remplacé… par une bouilloire ! Essayez donc d’y comprendre quelque chose.


Avec Usito et le GDT, on n’est pas sorti de la cabane !



L’influence d’un blog

On m’a signalé le 15 mars que, contrairement à mon affirmation, le GDT considère chaudière, et non seau, comme québécisme. Ce qui est maintenant effectivement le cas :




Mais j’avais pris la précaution de faire deux captures d’écran, l’une zoomant sur la rubrique « Termes privilégiés » (voir plus haut), l’autre de la fiche au complet :




Pour une fois, les responsables du GDT ont réagi rapidement en procédant à la correction. À quand la correction des fiches « détour », « comptoir de cuisine », « à l’emploi de », etc. ?



jeudi 5 mars 2015

Prime ou indemnité de départ ?


Depuis la démission surprise du ministre Yves Bolduc, il est beaucoup question dans les médias de prime de départ, prime de séparation, prime de transition, allocation de départ, etc. Le gouvernement entend déposer un projet de loi pour régler la question de la somme d’argent que touche un député lorsqu’il démissionne avant la fin de son mandat. Prenant les devants, le président-fondateur de l’Asulf (Association pour le soutien et l’usage de la langue française), le juge Robert Auclair, a écrit au premier ministre pour lui demander d’utiliser le terme correct, indemnité, dans le projet de loi qu’il compte présenter à l’Assemblée nationale. M. Auclair a joint à sa lettre la fiche « indemnité de cessation d’emploi » du Grand Dictionnaire terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française (OQLF). Cette fiche est un modèle de travail bien fait. Il est bien connu que je n’hésite pas à critiquer le GDT. Il me semble donc convenable, lorsque d’aventure je tombe sur une fiche remarquable, d’attirer l’attention sur elle.


Extrait de la fiche « Indemnité de cessation d'emploi » du GDT

mercredi 4 mars 2015

La chimère terminologique


Je reviens aujourd’hui encore sur la fiche « jouabilité » du Grand Dictionnaire terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française (OQLF). Mais je dois d’abord commencer en présentant deux définitions :

Notion : Unité de pensée constituée d’un ensemble de caractère attribués à un objet ou à une classe d’objets et qui peut s’exprimer par un terme ou par un symbole. (Rachel Boutin-Quesnel et al., Vocabulaire systématique de la terminologie, Office de la langue française, 1985, p. 18)

Concept : Unité de connaissance constituée d'un ensemble unique de caractères et qui peut généralement s'exprimer par un terme. (GDT)


Aujourd’hui, les terminologues préfèrent parler de concept plutôt que de notion. Peu importe. Ce qu’il faut retenir, c’est que les deux définitions commencent par le mot « unité ».


Or, que trouvons-nous dans la fiche « jouabilité » ? À deux reprises, l’expression « concept multiple », en soi une véritable chimère. En fait, il faut comprendre que le rédacteur de la fiche est parti du mot gameplay qui a plus d’un sens en anglais : loin d’être l’expression d’un « concept multiple », ce terme est polysémique. Ce qu’admet d’ailleurs l’auteur de la fiche : « ce concept multiple renvoie à deux sens distincts ». Si le mot a deux sens, c’est qu’il y a deux concepts ; et en bonne terminologie il faut faire deux fiches.


Il est tout de même étonnant que des terminologues (je mets le pluriel, car la fiche a sûrement fait l’objet d’une lecture par un deuxième terminologue) ne maîtrisent même pas le vocabulaire de leur discipline. C’est au moins la deuxième fois que je fais cette remarque.


mardi 3 mars 2015

L’ivresse de la profondeur


Extrait de la fiche « jouabilité » du Grand Dictionnaire terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française (OQLF) : « Parfois, les mots finissent par prendre le sens que l'usage leur donne. »


La rédaction de la phrase trahit un purisme abyssal. Combien a-t-il fallu d’années de pratique de la terminologie ou de la lexicographie pour arriver à cette conclusion on ne peut plus étonnante ? 


Quand on consulte le GDT, il n’est pas inutile de se prémunir contre l’ivresse des profondeurs.


lundi 2 mars 2015

In memoriam Joshua Fishman (1926-2015)




Le sociolinguiste Joshua Fishman est mort hier à son domicile du Bronx. J’avais fait sa connaissance lors d’un colloque à Ottawa en 1986. Plus récemment, dans ce blog, je me suis inspiré d’un de ses textes (« Le marteau de Fishman »).

 
Joshua Fishman, au premier rang à droite, lors d’un colloque à Ottawa en 1986

Voici le texte qu’a publié l’une de ses collaboratrices et qui résume l’ensemble de l’œuvre de Joshua Fishman :

A beloved teacher and influential scholar, Joshua A. Fishman passed away peacefully in his Bronx home, on Sunday evening, March 1, 2015. He was 88 years old. Joshua A. Fishman leaves behind his devoted wife of over 60 years, Gella Schweid Fishman, three sons and daughters-in-law, nine grandchildren and two great-grandchildren. But he also leaves behind thousands of students throughout the world who have learned much from him about sociology of language, the field he founded, and also about the possibility of being a generous and committed scholar to language minority communities. As he once said, his life was his work and his work was his life.
Joshua A. Fishman, nicknamed Shikl, was born in Philadelphia PA on July 18, 1926. Yiddish was the language of his childhood home, and his father regularly asked his sister, Rukhl, and him: “What did you do for Yiddish today?” The struggle for Yiddish in Jewish life was the impetus for his scholarly work. After graduating from the University of Pennsylvania with a Masters degree in 1947, he collaborated with his good friend, Max Weinreich, the doyen of Yiddish linguistics, on a translation of Weinreich’s history of Yiddish. And it was through Yiddish that he came to another one of his interests ––that of bilingualism. In 1948 he received a prize from the YIVO Institute for Yiddish Research for a monograph on bilingualism. Yiddish and bilingualism were interests he developed throughout his scholarly life.
After earning a PhD in social psychology from Columbia University in 1953, Joshua Fishman worked as a researcher for the College Entrance Examination Board. This experience focused his interest on educational pursuits, which eventually led to another strand of his scholarly work –– that on bilingual education. It was around this time that he taught what came to be the first sociology of language course at The City College of New York. In 1958, he was appointed associate professor of human relations and psychology at the University of Pennsylvania, and two years later, moved to Yeshiva University. At Yeshiva University he was professor of psychology and sociology, Dean of the Ferkauf Graduate School of Social Science and Humanities, Academic Vice President, and Distinguished University Research Professor of Social sciences. In 1988, he became Professor Emeritus and began to divide the year between New York and California where he became visiting professor of education and linguistics at Stanford University. In the course of his career, Fishman held visiting appointments at over a dozen universities in the USA, Israel, and the Philippines, and fellowships at the Center for Advanced study (Stanford), the East West Center (Hawai’i) the Institute for Advanced Study at Princeton, the Netherlands Institute for Advanced Study, and the Israel Institute for Advanced Study.
Throughout his long career Joshua A. Fishman has published close to one hundred books and over a thousand articles. He has not only been prolific, but his original and complex ideas have been very influential in the academy, as well as extremely useful to language minorities through the world. His first major study of sociology of language, Language Loyalty in the United States, was published in 1964. A year later, he published Yiddish in America. In 1968, he published the earliest major collection dealing with language policy and management, Language problems of developing nations. In the same year, he edited and published Readings in the sociology of language, a first attempt to define the new field.
By the 1970s Joshua Fishman’s scholarship was recognized throughout the world for its importance and its relevance about the language issues prevalent in society. In 1973, he founded, and has since edited, The International Journal of the Sociology of Language, a journal of excellent international reputation. Joshua Fishman has also edited a related book series published by Mouton, Contributions to the Sociology of Language (CSL), with over 200 titles. In both of these endeavors Fishman has encouraged young scholars to research, write and publish, supporting and contributing to the academic careers of many throughout the world, especially in developing countries. For years he replied daily to letters and e-mails from students from all over the world. His greatest motivation has been dialoguing with many about the use of language in society and answering student questions. The world was his classroom.
While conducting an impressive body of research, and being responsive to the many who asked for advice, Fishman traveled extensively, encouraging the activities of those seeking to preserve endangered languages. He will be remembered by the Māoris of New Zealand, the Catalans and Basques of Spain, the Navajo and other Native Americans, the speakers of Quechua and Aymara in South America, and many other minority language groups for his warmth and encouragement. For a quarter-century, he wrote a column on Yiddish sociolinguistics in every issue of the quarterly Afn Shvel. He also wrote regularly on Yiddish and general sociolinguistic topics for the weekly Forverts. Together with his wife Gella Fishman, he established the extensive five-generational "Fishman Family Archives" at Stanford University library. In 2004 he received the prestigious UNESCO Linguapax Award in Barcelona, Spain. 
Joshua Fishman’s prolific record of research and publication has continued until today, defining modern scholarship in bilingualism and multilingualism, bilingual and minority education, the relation of language and thought, the sociology and the social history of Yiddish, language policy and planning, language spread, language shift and maintenance, language and nationalism, language and ethnicity, post-imperial English, languages in New York, and ethnic, and national efforts to reverse language shift. 
His scholarly work with minority groups and with others engaged in the struggle to preserve their languages, cultures, and traditions has been inspired by a deep and heartfelt compassion that is always sustained by the markedly human tone of his most objective scholarly writing. 
Ofelia García
Professor
Ph.D. Programs in Urban Education
Graduate Center
The City University of New York



dimanche 1 mars 2015

À quel jeu jousent-ils ?



Ce qui n'est pas clair n'est pas français ; ce qui n'est pas clair est encore anglais, italien, grec ou latin.

Antoine de Rivarol, Discours sur l’universalité de la langue française

Je ne sais plus par quelle voie, il y a de cela plusieurs mois, j’ai abouti à la fiche « jouabilité » du Grand Dictionnaire terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française (OQLF). En fait, le GDT a deux fiches, l’une qu’il a produite, l’autre empruntée à FranceTerme (Commission générale de terminologie et de néologie en France). Les deux fiches datent de 2010. Comparons-les :

Grand Dictionnaire terminologique (GDT)
FranceTerme
Ensemble des éléments liés à l'interaction entre le joueur et le jeu, dont les règles et les possibilités d'actions, qui sont définis et intégrés au jeu lors de la création d'un jeu vidéo, et qui contribuent au plaisir de jouer, découlant de l'interactivité, ressenti pendant le jeu.
Difficile à définir et à traduire en français, gameplay est un terme auquel on donne plusieurs sens. En fait, ce concept multiple renvoie à deux sens distincts. Dans gameplay, le mot game renvoie à un système de règles que le joueur doit respecter pour mener à bien son action, tandis que le mot play correspond à l'action menée par le joueur, à l'attitude ludique qu'il adopte vis-à-vis de cette structure de jeu. Gameplay évoque à la fois la notion de règles du jeu (associée à la mécanique de jeu) destinées à produire une expérience de jeu plaisante, et celle d'actions possibles offertes au joueur, de manière d'interagir librement, de facilité de prise en main (associée à la jouabilité). Il reflète ainsi la tension présente dans tout jeu vidéo entre règles strictes (game) et liberté d'action (play).
Le concept de « gameplay  » comportant deux aspects, on pourra, selon le contexte et l'aspect que l'on veut mettre en évidence, le rendre en français par jouabilité ou mécanique de jeu, chacun des termes illustrant un aspect différent de ce concept multiple.
Actuellement, c'est le terme jouabilité, dont le sens a évolué, qui est le plus souvent utilisé pour traduire gameplay (concept global). En matière de langue, il arrive que l'usage change partiellement ou étende le sens premier d'un mot. Cela semble le cas pour jouabilité : grâce à la synecdoque (figure de style), on assigne à un mot un contenu plus étendu que son contenu habituel, en prenant, par exemple, la partie pour le tout. Parfois, les mots finissent par prendre le sens que l'usage leur donne.
Notes
Parmi les autres éléments d'interaction, indispensables à une expérience vidéoludique plaisante, mentionnons l'ergonomie des commandes (facilité de prise en main) et l'architecture compétitive du jeu. 

Ensemble des possibilités d'action offertes au joueur par un jeu vidéo; par extension, qualité du jeu appréciée au regard de ces possibilités.

Ce qui n’est pas clair n’est pas français. Ce qui n'est pas clair est encore anglais. La fiche du GDT est encore de l’anglais.