Le projet de loi 33 (Loi éliminant le placement syndical et visant l'amélioration du fonctionnement de l'industrie de la construction), actuellement à l'étude en commission parlementaire à l'Assemblée nationale, contient une dizaine de fautes que les élus devraient corriger immédiatement, des fautes que tous les dictionnaires reconnaissent. Les principales sont «agent d'affaires» (en français: agent syndical), «coûts défrayés» (coûts payés), «être à l'emploi de» (employé par), «renseignements» (mentions), «certificat de compétence» (certificat de qualification), «occupation» (emploi), «référer» (diriger vers)...
Gaston Bernier, président de l’Asulf (Association pour le soutien et l’usage de la langue française), Le Devoir, 10 novembre 2011, p. A6
L’actualité m’offre l’occasion de vérifier comment le Grand Dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française traite les termes mentionnés dans la lettre de l’Asulf. Passons donc en revue chacun de ces termes.
La fiche traitant d’agent d’affaires comme calque de l’anglais business agent devant être remplacé par le terme agent syndical est un modèle du genre. Bravo à son rédacteur ou à sa rédactrice !
Je n’ai rien trouvé dans le GDT sur l’expression coûts défrayés qui devrait être remplacée par coûts payés.
En ce qui concerne le mot emploi, le GDT nous informe que les termes à éviter sont : occupation, position. Il ajoute : « Ce terme [emploi] est employé dans différentes expressions courantes : avoir un emploi, prendre un emploi, être sans emploi, demande d'emploi, chercher un emploi, trouver un emploi. » – Il est significatif que le rédacteur de cette fiche n’ait pas cru bon d’ajouter l’expression être à l’emploi de, ce que j’interprète comme un désaccord avec la position défendue par le rédacteur de la fiche être à l’emploi de.
On sait que le GDT accepte l’expression être à l’emploi de : « La locution être à l'emploi de est d'un usage ancien et généralisé au Québec, tant dans le registre spécialisé que dans le registre courant. Elle est notamment utilisée dans plusieurs textes officiels (lois, règlements, codes, etc.) et est en usage sporadiquement ailleurs dans la francophonie. Bien qu'elle soit critiquée par des ouvrages correctifs à cause de l'origine qu'on lui attribue généralement (calque de l'anglais to be in the employ of), la locution être à l'emploi de constituerait en fait une adaptation morphosyntaxique d'un emprunt plus ancien en français du Québec (être dans l'emploi de, relevé dans le dernier quart du XIXe siècle). Cette adaptation est parfaitement conforme au système linguistique du français. » J’ai écrit un billet sur le sujet auquel je me contente de renvoyer le lecteur (Banderilles / 6) pour ne pas avoir à reprendre ici une démonstration assez longue. Ajoutons simplement que l’Asulf réclame depuis des années la disparition de cette expression des textes législatifs et réglementaires.
La fiche certificat de qualification (terme à éviter : certificat de compétence) est parfaite de mon point de vue.
En ce qui a trait au verbe référer utilisé au lieu de diriger vers, les fiches du GDT ayant référer comme entrée principale ne concernent pas le domaine travail. En revanche, la Banque de dépannage linguistique comble la lacune et offre les exemples suivants pour le verbe référer :
- Nous avons référé cette cliente au Service à la clientèle = Nous avons dirigé cette cliente vers le Service à la clientèle
- Je vais référer votre candidature à la directrice des ressources humaines = Je vais transmettre votre candidature à la directrice des ressources humaines
Le GDT et la BDL n’ont rien sur le terme renseignements utilisé au lieu de mentions.
Ma conclusion ne peut que faire écho à mon titre : grandeur du GDT dans certains cas, quelques lacunes et misère de s’obstiner à défendre l’indéfendable.
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