lundi 4 août 2014

La maire ou la mairesse ?




Orienter l’usage ou être orienté par l’usage ? Ou encore accepter d’être en retard sur l’usage ? En juin dernier, l’Académie française publiait le rappel suivant sous le titre « La maire » :


Peut-être n’est-il pas inutile de rappeler, quelque temps après les élections municipales, que maire est un nom masculin, que la personne qui exerce cette fonction soit un homme ou une femme, et qu’il convient de distinguer le sexe d’une personne qui exerce une fonction du nom qui désigne cette fonction. Il en va de même pour les autres fonctions comme ministre et préfet ou, pour d’autres termes plus généraux, comme témoin ou professeur. À l’inverse, et sans qu’aucun lien n’unisse ces différents mots, crapule et vedette sont des noms féminins, que les personnes que l’on qualifie ainsi soient des hommes ou des femmes. On dira donc : Madame X est le maire de la commune, Monsieur Y est une grande vedette, mais son frère est une crapule.


Dans son argumentaire, l’Académie ne se rend pas compte que les mots crapule et vedette ne sont pas des noms de fonction…


Au Québec, le féminin la maire semble plutôt marginal puisqu’on lui préfère mairesse. Je me rappelle toutefois qu’aux Jeux olympiques de Montréal, lord Killanin, président du CIO, avait parlé de Jean Drapeau comme de « la maire de Montréal ». Ce ne fut pas le seul lapsus de ces Jeux qui ont connu une remise de médailles en… hétérophilie.


Plusieurs croient à tort que le suffixe –esse est toujours péjoratif. De nombreux exemples montrent pourtant que ce n’est pas le cas lorsqu’il s’agit de noms de fonction : comtesse, vicomtesse, duchesse, princesse, prêtresse, abbesse. Les écrivains anticléricaux n’ont pas de scrupule à parler de la légendaire papesse Jeanne. Tous ces exemples sont des titres s’appliquant à une femme qui exerce les mêmes fonctions qu’un homme.


En ce qui concerne les noms de métier ou de profession, le Trésor de la langue français informatisé cite doctoresse et contremaîtresse et il ajoute qu’« en dehors de ces deux mots, les fém. en -esse sont considérés comme des formations marginales ou marquées péjorativement ». Mais le Trésor de la langue française a été publié de 1971 à 1994. L’utilisation des formes féminines ou épicènes (formes valables pour les deux genres) a beaucoup progressé depuis ce temps. On peut prévoir qu’il restera des exceptions, mannequin au masculin même en parlant de femmes, vedette au féminin même en parlant d’hommes, mais que maire au masculin en parlant d'une femme n’en fera pas partie : pour s’en persuader il suffit de lire et d’écouter les médias francophones aussi bien du Québec que d’Europe.



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