mercredi 25 mars 2020

La schizophrénie terminologique



C’est par l’entremise de la page Facebook de Gaston Bernier (de l’Asulf) que j’ai appris que l’Office québécois de la langue française (OQLF) avait réhabilité en 2016 le terme centre d’achat(s) dont il avait jusqu’alors déconseillé l’usage :

L’Office de la langue a décidé il y a quarante ans d’officialiser l’expression « centre commercial » contre le calque «centre d’achats». Depuis quatre décennies, tous ont favorisé l’équivalent français (C. Chouinard, P. Cardinal, Le Multi dictionnaire, le Colpron, le Guide de rédaction de la P.C., etc.). Mais l’Office a fait marche arrière : « Le terme centre d'achats … construit sur le modèle de l'anglais … s'intègre au système linguistique du français. Les réserves déjà émises sur l'usage de ce terme n'ont pas lieu d'être… »


J’admets que le fait avait échappé à mon attention. Cette réhabilitation n’est qu’une preuve de plus de la dérive dénoncée par les anciens terminologues de l’OQLF dans leur manifeste « Au-delà des mots, les termes ».


Comme note explicative, on a droit à la salade habituelle : « Le terme centre d'achats (ou centre d'achat), construit sur le modèle de l'anglais shopping center, s'intègre au système linguistique du français. » Ben oui, les calques, de par leur nature même, sont déjà intégrés dans le système linguistique de la langue emprunteuse. Les néo-terminologues de l’OQLF ont fait cette « découverte » en préparant leur dernière Politique de l’emprunt linguistique : ils n’ont ainsi fait que redécouvrir l’Amérique.


Si j’ai utilisé le mot de schizophrénie dans le titre de mon billet, c’est que le Grand Dictionnaire terminologique (GDT) contient une autre fiche sur le même terme, produite par l’Institut canadien des comptables agréés, qui ne donne comme acceptable que centre commercial et où on affirme qu’« au Canada, sous l'influence de l'anglais, on emploie fréquemment l'expression centre d'achat. »



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