lundi 31 juillet 2023

Jamais l’usage du français au travail n’a atteint 95 % au Québec

 

Le 13 juillet j’ai publié un billet (« Idée fausse sur l’exode des anglophones ») où je critiquais un point d’un article de la journaliste Sarah R. Champagne du Devoir. Mais, n’étant pas démographe, une erreur de taille m’avait échappé :

 

Ce sont près de 94 % des Québécois qui déclarent être capables de soutenir une conversation en français […]

[…]

« …mais les données sur les populations de travailleurs qui utilisent le français au travail correspondent aussi à environ 95 %. » [Cette phrase est de Jean-Pierre Corbeil, anciennement de Statistique Canada et ancien membre du Comité de suivi de la situation linguistique de l’Office québécois de la langue française].

 

 

Ce que je ne pouvais pas savoir, c’est que les deux pourcentages ne sont pas calculés sur les mêmes dénominateurs. La comparaison est donc erronée.

 

 

En fait, il y a plutôt 67,5 % des gens qui utilisent le français au travail. Quasiment 30 points de moins : une bagatelle, quoi !

 

 

Mon ancien collègue Michel Paillé vient de faire à ce sujet une mise au point (que l’on peut lire en cliquant ici) : « ces deux proportions quasi identiques ne se comparent tout simplement pas, car elles sont de nature différente. Alors que les 94 % touchant la connaissance du français renvoient à un total de 100 %, les 95 % qui suivent se rapportent à un total atteignant presque 140 %. »

 

jeudi 13 juillet 2023

Idée fausse sur l’exode des anglophones


La proportion d’unilingues anglophones a diminué

La proportion des Québécois qui déclarent avoir l’anglais comme langue maternelle a diminué depuis 1971, se chiffrant à 7,6 % dans le plus récent recensement. Quant à la connaissance de l’anglais seulement, ce sont 5,3 % des répondants qui ont coché cette case. Malgré un petit bond entre 2016 et 2021, attribuable notamment à la forte croissance des résidents non permanents, dit Jean-Pierre Corbeil, cette statistique n’a jamais retrouvé les niveaux des années 1951 à 1971.

« L’histoire est assez simple. Le phénomène s’explique essentiellement par l’exode important de la population de langue anglaise au Québec, qui est partie vers l’Ontario et d’autres provinces à partir du milieu des années 1960 jusqu’en 1981 », notamment après l’arrivée du Parti québécois au pouvoir.

Sarah R. Champagne, « Le déclin du français, ou quatre faits linguistiques méconnus sur le Québec », Le Devoir, 13 juillet 2023

 

L’émigration des anglophones a commencé bien avant le milieu des années 1960. En 1967, Richard J. Joy (Languages in Conflict : The Canadian Experience) notait que l’exode des Anglo-québécois n’était pas un phénomène nouveau et précisait que « les recensements montrent qu’il existe depuis plus d’un siècle ». Seulement, avant l’adoption de la loi 101, les rangs de la minorité anglophone étaient régulièrement regarnis grâce à l’intégration des immigrants non francophones.

 

lundi 10 juillet 2023

Dépasser les bornes

 

Ce matin j’ai vu ce tweet d’Élisabeth Borne, la première ministre de France, se félicitant dans Le Parisien des progrès accomplis par son gouvernement :

 


 

Heureusement encore qu’elle met (ou que le journaliste met) les guillemets ! Voilà un bel exemple de la langue technocratique des élites françaises.

 

L’Académie lui proposerait sûrement d’écrire plutôt : nous avons tenu parole, nous avons livré la marchandise.

 

En français, le verbe délivrer est transitif. En anglais, to deliver peut être intransitif et signifier « to produce the promised, desired, or expected results ».


P.S.: l'absence d'accord du participe passé est due au journaliste.