lundi 13 décembre 2021

Les anglicismes à la mode

 

J’ai lu l’autre jour le billet d’un grogniqueur qui me reprochait de parler des anglicismes sur le ton de la condamnation. Il visait en particulier mon billet sur « frapper un mur ». Or, il se trouve que mon texte était uniquement descriptif, sans même de proposition pour remplacer le calque. Ce qu’a d’ailleurs fort bien compris un lecteur pour me le reprocher. Était aussi visé un article de Lionel Meney sur le même sujet. Il se terminait pourtant par ces mots qui sont loin d’être une condamnation ferme du calque :

 

Dans la publicité québécoise, la jeune femme ne « frappe pas un mur », elle « se heurte à un mur », ce qui l'empêche de rejoindre le jeune homme. La seconde formulation est linguistiquement plus correcte mais, en contexte québécois, la première est expressivement bien plus forte…

 

Aujourd’hui encore, je vais parler d’anglicismes sur le mode descriptif.

 

J’ai noté depuis plusieurs semaines qu’à la télévision et à la radio publiques on utilisait couramment l’expression « bris de service » (dans les hôpitaux). Le journaliste du Devoir Michel David me semble à peu près seul à lui préférer « rupture de service ». Nos médias parlent aussi beaucoup de « plan de contingence » (contingency plan).

 

Une lectrice m’a communiqué qu’elle avait entendu Olivier Véran, ministre de la Santé et des Solidarités de France, dire « à date ». J’avais déjà noté l'apparition de cette expression en France depuis quelques mois. Je l’ai entendue dans la bouche du premier ministre Jean Castex et dans celle du président Macron. Pas étonnant, au fond, de la part de celui qui se veut le président de la Start-Up Nation. Je crois que l'origine doit en être cherchée dans la langue des bureaucrates de Bruxelles (voir mon billet du 28 juillet 2016).

 

J’ai entendu la semaine dernière Jean Castex employer le verbe « booster ». Il a aussi parlé des citoyens « éligibles » à la vaccination. Ce dernier adjectif est devenu tout à fait courant en France, le ministère de la Santé l’utilise même dans ses publicités.

 

Et le professeur Raoult (IHU Marseille) parle couramment d’« évidences » (preuves) scientifiques.

 

Il y a plusieurs années, en lisant Le français et les siècles (1987), j’avais constaté que plusieurs des anglicismes que Claude Hagège signalait comme récents en France étaient depuis longtemps bien connus au Québec. Les Français continuent d’emprunter les mêmes mots anglais que nous, mais avec quelques décennies de retard.

 

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