mercredi 15 juin 2016

Langue de vipère



Durant la course à la succession de Pauline Marois, les adversaires de M. Drainville, qui se présentait comme la « voix de la laïcité », n’avaient qu’un seul désir : refermer cette « canne de vers » au plus vite.
– Michel David, « Le bouc émissaire », Le Devoir, 14 juin 2016


On voit par cette citation que nos journalistes, même les meilleurs, sont conditionnés à recourir à des expressions anglaises, ou à des traductions plus ou moins approximatives d’expressions anglaises. Le Larousse anglais-français en ligne traduit a (real) can of worms par un (vrai) casse-tête. Le site Linguee donne encore plus d’équivalents : un panier de crabes, un guêpier, un débat difficile ; to open a can of worms : ouvrir la boîte de Pandore. J’ai trouvé ailleurs : sac d’embrouilles, nid à emmerdes, sac de nœuds, et pour to open a can of worms, donner un coup de pied dans la fourmilière, lever un lièvre.



J’ajoute la proposition suivante : nœud de vipères, « enroulement de vipères enchevêtrées les unes dans les autres » (Trésor de la langue française informatisé, s.v. nœud). Le TLFi est plus volubile s.v. vipère :

Nid/nœud de vipères. Rassemblement de personnes méchantes, cruelles, malveillantes, médisantes; regroupement de forces hostiles. Charpentier n'en finissait pas sur le nid de vipères qu'est le couple Forain, me donnant à entendre leurs méchancetés (GONCOURT, Journal, 1893, p. 346). Le goût des intrigues et des chicanes qui grouillent dans ces « nœuds de vipères » que sont volontiers ces tribus décadentes [les familles] serrées sur leurs intérêts, sur leurs rancunes jalouses, sur leurs haines aux aguets (MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 105).

Littér. Accumulation de choses mauvaises, de méchancetés, de médisances. Un article qui est un vrai nid de vipères, une invraisemblable accumulation de perfidies (GONCOURT, Journal, 1896, p. 937). Je connais mon cœur, ce cœur, ce nœud de vipères: étouffé sous elles, saturé de leur venin, il continue de battre au-dessous de ce grouillement. Ce nœud de vipères qu'il est impossible de dénouer, qu'il faudrait trancher d'un coup de couteau, d'un coup de glaive (MAURIAC, Nœud vip., 1932, p. 163).


Comme on le voit, on peut facilement se dispenser d’utiliser canne de vers car ce ne sont pas les expressions françaises qui manquent pour rendre l’anglais (to open a) can of worms.


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