mardi 15 octobre 2019

Cercle vicieux


Dans les fiches du Grand Dictionnaire terminologique (GDT) que l’Office québécois de la langue française met en vedette chaque mois, il y a souvent matière à billet de blog. Ainsi en est-il encore ce mois-ci. Dans la fiche « directissime », de 2019, on peut lire la note :

L'emprunt intégral adapté directissime, de l'italien direttissima qui signifie « la plus directe », est acceptable puisqu'il est légitimé en français au Québec et ailleurs en francophonie. 


Dans la mesure où un emprunt est adapté, on peut se demander s’il s’agit encore d’un emprunt intégral. Mais cette subtilité sémantique aura échappé au rédacteur de la fiche.


L’OQLF ressort aussi une idée-phare de la dernière Politique de l’emprunt linguistique, la légitimation. On n’a jamais su comment se faisait au juste cette légitimation. L’hypothèse de Nadine Vincent, dans un texte publié le 29 septembre 2017 dans Le Devoir, est la plus vraisemblable :

[…] la nouvelle politique de l’emprunt de l’OQLF étonne. Elle prétend qu’elle opte maintenant pour une « stratégie d’intervention réaliste », qu’elle va tenir compte de la « légitimité » des usages et de leur traitement dans des « ouvrages normatifs ». Or, sur qui se basent les ouvrages normatifs pour accepter ou critiquer un emploi : bien souvent sur l’OQLF !

Je viens de trouver une illustration on ne peut plus claire de ce cercle vicieux dans la note accompagnant la fiche « cyberdépendance » qui date de la même année (2017) que la Politique de l’emprunt linguistique :

L'emprunt intégral à l'anglais addiction, surtout en usage en Europe francophone, ne s'inscrit pas dans la norme sociolinguistique du français au Québec; il est notamment critiqué dans les principaux ouvrages de référence québécois.


Les ouvrages normatifs se basent sur l’OQLF et l’OQLF sur les ouvrages normatifs. Et voilà comment s’édifie la norme du « français standard en usage au Québec »!


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