jeudi 18 octobre 2012

Les hauts et les bas de l’anglais à Montréal


Le 2 octobre (« Publier en temps de crise »), j’annonçais mon intention de commenter les études lancées par l’Office québécois de la langue française le 1er juin. Évidemment, en pleine crise étudiante, ces études n’ont guère retenu l’attention des médias. Quand l’actualité est aussi chargée, on se contente de lire les communiqués de presse, à la rigueur on parcourt rapidement les résumés mais on n’a pas le temps d’aller plus loin et de lire les études elles-mêmes. L’actualité se charge ensuite de plonger dans l’ombre des études apparues fugitivement sur le radar de l’opinion publique.


Aujourd’hui, je ferai quelques brèves remarques sur le rapport La langue de l’affichage commercial sur l’île de Montréal en 2010. On y lit à la page 10 : « La présence de l’anglais sur la devanture des commerces montréalais (nom d’entreprise et autres messages) est demeurée stable entre 1997 et 2010 (entre 43 % et 41 %), malgré un rebond temporaire en 1999 (49 %). » Ce que présente le tableau de la page 39 du rapport :





De 1997 à 1999, on passe de 43 % à 49 % de commerces ayant de l’anglais dans leur affichage. Mais cette augmentation n’est pas significative du point de vue statistique.


De 1999 à 2010, on passe de 49 % à 41 % des commerces ayant de l’anglais dans leur affichage et cette baisse est statistiquement significative.


Le Parti québécois a été au pouvoir de 1994 à 2003. Pendant cette période, les données de l’enquête indiquent que la présence de l’anglais est demeurée stable dans l’affichage commercial à Montréal (puisque la hausse apparente de 43 % à 49 % n’est pas statistiquement significative).


Le Parti libéral a été au pouvoir de 2003 à 2012. En 2010, la présence de l’anglais dans l’affichage commercial avait baissé de 49 % à 41 % et la différence est statistiquement significative.


Les données de l’enquête ayant été publiées en période pré-électorale, il fallait s’attendre à ce que les libéraux n’insistent pas sur le recul de l’anglais dans l’affichage commercial, car cela pouvait les desservir auprès de l’électorat anglophone qui leur est traditionnellement acquis. Les péquistes non plus n’avaient pas intérêt à attirer l’attention sur des données qui pouvaient laisser croire qu’au moins sur un point de la politique linguistique les libéraux avaient fait mieux qu’eux.


Quant à l’Office québécois de la langue française, il est pour le moins curieux qu’il n’ait pas mis davantage en lumière des données qui pouvaient servir à montrer l’efficacité de son travail. Il est vrai que le recul de l’anglais constaté dans l’affichage commercial venait en contradiction avec les résultats d’autres études publiées simultanément et qui, elles, montraient plutôt un recul du français (y compris un léger recul dans l'affichage, cf. tableau plus haut).

mercredi 10 octobre 2012

À la hauteur des attentes / 2



Dans le billet précédent, j’ai raconté que le hasard m’a fait chercher le mot Fête-Dieu dans le dictionnaire Franqus. Ce que j’y ai découvert m’a engagé à aller un peu plus loin dans le traitement que ce dictionnaire fait du vocabulaire religieux, en particulier catholique. Trouvant mon premier billet suffisamment long, je n’y ai pas inclus mes recherches sur les appellations de quelques vêtements liturgiques.


Dans le tableau suivant, qui compare les définitions du Franqus et du Trésor de la langue française informatisée (TLFi), on voit que le Franqus ne traite pas certains mots ou ne rend pas compte de leur sens religieux (amict, manipule, corporal). On voit aussi que ses définitions sont en général plus courtes que celles du TLFi (en rouge, les éléments de la définition du TLFi qui n’apparaissent pas dans le Franqus). On découvre aussi une sorte d’incohérence dans le traitement de deux mots désignant des objets pourtant associés dans le culte catholique : le mot pale est présent dans le Franqus mais pas corporal. Mais ce n’est pas le plus curieux.



Franqus
Trésor de la langue française informatisé
amict
(absent)
RELIG. CATHOL. Linge blanc, de forme carrée ou rectangulaire que le prêtre, le diacre et le sous-diacre placent sur leurs épaules avant de revêtir l'aube et les ornements sacrés pour dire ou servir la messe
aube
Tunique blanche en toile de lin que les officiants portent pour célébrer la messe
LITURG. Tunique blanche en toile de lin, serrée à la taille par un cordon, munie de manches étroites, que l'officiant (prêtre, diacre ou sous-diacre) porte par-dessus la soutane pour célébrer la messe ou dans quelques autres cérémonies
manipule
(sens absent)



Antiq. rom. Étendard d’une compagnie militaire romaine. ◊ Unité de la légion romaine, composée de deux centuries et formant le tiers de la cohorte.
LITURG. CATH. Ornement consistant en une petite bande d'étoffe, porté sur l'avant-bras gauche par les ministres à l'autel.
HIST. ROMAINE. Unité tactique de la légion romaine formant le tiers de la cohorte et composée elle-même de deux centuries.
pale
Linge sacré carré et renforcé de carton dont le prêtre recouvre le calice pendant la messe
LITURG. CATH. Linge sacré de lin ou de chanvre carré et renforcé de carton dont le prêtre recouvre le calice pendant la messe.
corporal
(absent)
LITURG. CATH. Linge consacré, généralement de lin blanc, représentant le suaire du Christ, que le prêtre étend, pendant la messe, au milieu de l'autel sous le calice, pour recueillir les fragments de l'hostie, qu'il consacre.
étole
Longue bande d’étoffe que l’évêque, le prêtre et le diacre portent sur les épaules.
LITURG. Ornement liturgique en forme de bande d'étoffe, longue et étroite, que le prêtre et l'évêque portent par devant, suspendue au cou et que le diacre porte en écharpe sur l'épaule gauche.



De la liste précédente, le mot le plus intéressant est sans conteste manipule. D’abord parce que le Franqus ne donne pas le sens que ce mot a dans la religion catholique. Ensuite et surtout parce qu’il offre un sens qu’on ne trouve nulle part ailleurs : « étendard d’une compagnie militaire romaine ».


Procédons à une enquête lexicographique.


Le TLFi a trois entrées distinctes pour manipule :

MANIPULE1, subst. masc.
LITURG. CATH. Ornement consistant en une petite bande d'étoffe, porté sur l'avant-bras gauche par les ministres à l'autel.

MANIPULE2, subst. masc.
I. HIST. ROMAINE. Unité tactique de la légion romaine formant le tiers de la cohorte et composée elle-même de deux centuries. Les changements introduits par Marius consistèrent principalement (...) à substituer dans les manoeuvres la division en cohortes, à la division en manipules (MÉRIMÉE, Essai guerre soc., 1841, p. 54).
II.
PHARM., vx. Poignée de plantes, de graines, entrant dans la composition d'un remède. Prenez un manipule de fleurs d'oranger (Ac. 1835, 1878).

MANIPULE3, subst. masc.
Vieilli. ,,Ustensile qui sert à retirer un vase du feu sans se brûler`` (Ac. 1835-1935; dict. XIXe et XXe s.). Synon. poignée.


Voyons ce que dit le Littré :

·         1Terme de pharmacie. Ce que la main peut tenir d'herbes, de fleurs, de graines. Les médecins, dans leurs ordonnances, désignent cette mesure par la lettre M.
Manipule pyrotechnique, faisceau de pétards liés ensemble qu'on jetait à la main dans les rangs ennemis.
·         2 Terme de pharmacie. Ustensile qui sert à retirer un vase du feu sans se brûler.
·         3Petite bande d'étoffe que le prêtre catholique porte au bras gauche en célébrant la messe.
·         4 Terme d'antiquité romaine. Compagnie d'infanterie, composée, à l'origine, de cent hommes, et commandée par deux centurions ; ainsi dite figurément parce que c'est un faisceau, une poignée d'hommes.


Le sens d’« étendard d’une compagnie militaire romaine » ne se trouve pas dans les éditions de 1694, 1762, 1798, 1835 et 1932-1935 du Dictionnaire de l’Académie. Il ne figure pas non plus dans le Dictionnaire critique de la langue française de Jean-François Féraud (1787-1788).


Je retrouve dans ma bibliothèque l’Encyclopédie de l’Antiquité classique (avec sur la page de garde : hoc Latinae linguae praemium meritum et consecutum fuisse in solemni praemiorum distributione habita die sexta mensis julii anno millesimo sexagesimo quinto – ce qui n’est pas pour me rajeunir). Manipule : « unité militaire romaine, comprenant deux centuries ; chaque manipule possédait un signum, ou enseigne […] » (Bruxelles, Éditions Sequoia, 1962, p. 159).


D’où peut donc bien venir le sens d’« étendard d’une compagnie militaire romaine » ? Allons maintenant chercher du côté du latin manipulus.


Voici ce que dit le Dictionnaire illustré latin-français de Gaffiot, s.v. manipulus : « 1 manipule, poignée, gerbe, botte [herbe, fleurs, etc.] 2 manipule [trentième partie de la légion] ».


Le Dictionnaire des antiquités grecques et romaines de Daremberg et Saglio (10 volumes publiés de 1877 à 1919) nous apprend que manipulus signifiait à l’origine une botte de foin servant d’enseigne à une division de la légion romaine et que « le manipule, division de la légion, aurait pris son nom de l’enseigne qui la distinguait ». Cette supposition se base principalement sur un texte d’Ovide :

Ovide, Fastes III, 113-118

Il n'y avait d'autres constellations pour les Romains que les étendards militaires; celui qui les abandonnait commettait un grand crime. Ce n'était pourtant qu'une gerbe de foin (signa... e feno, litt. 'des étendards faits de foin'); mais elle n'était pas moins respectée alors que nos aigles d'argent ne le sont aujourd'hui. Cette gerbe (maniplos), on la portait au haut d'une longue perche; de là le nom de manipulaire donné au soldat (trad. Nisard, 1857).


On trouve dans le Glossarium mediae et infimae latinitatis de Du Cange (éd. de Favre, 1883-1887) : « Manipuli dicti sunt signiferi, quia olim manipulus fœni fuit pro vexillo », c’est-à-dire : on appelait manipules les porteurs d’enseignes parce qu’autrefois une poignée de foin tenait lieu d’étendard. Définition évidemment inspirée du texte d’Ovide, texte qui avait déjà inspiré les définitions données par Servius à la fin du ive siècle (A. XI, 70 : manipli autem dicti sunt signiferi, qui sub Romulo pauper adhuc Romanus exercitus hastis faeni manipulos illigabant et hos pro signis gerebant) et Isidore de Séville aux vi-viie siècles (IX, 3, 50 : …quod antequam signa essent, manipulos sibi, id est fasciculos stipulae vel herbae alicuius, pro signis faciebant).

Je n’ai trouvé nulle part en français le sens d’« étendard d’une compagnie militaire romaine » que le Franqus donne au mot manipule. En latin classique le mot manipulus n’a pas non plus ce sens même si, étymologiquement, l’unité militaire appelée manipule aurait pu tirer son nom de la botte de foin qui tenait lieu d’étendard aux premiers temps de Rome (à l’époque de Romulus selon l'indication donnée par Servius dans son commentaire de l’Énéide).


En fait, je n’ai trouvé qu’un seul texte – en grec – qui peut en apparence appuyer le sens d’« étendard » donné à manipule :

πολλὴν δὲ καὶ σὺν αὑτῷ δύναμιν ἦγε συλλελοχισμένην εἰς ἑκατοστύας· ἑκάστης δ’ ἀνὴρ ἀφηγεῖτο χόρτου καὶ ὕλης ἀγκαλίδα κοντῷ περικειμένην ἀνέχων· μανίπλα ταύτας Λατῖνοι καλοῦσιν· ἀπ’ ἐκείνου δὲ καὶ νῦν ἐν τοῖς στρατεύμασι τούτους μανιπλαρίους ὀνομάζουσιν.
Plutarque, Romulus 13
« [Romulus] amenait un corps considérable de troupes, divisées en compagnies de cent hommes. Chaque compagnie avait pour guide un homme armé d’une perche, que surmontait un faisceau de foin et de menu bois : c’est ce que les Latins appellent des manipules ; et les soldats qui suivent ces enseignes portent, encore aujourd’hui, dans les armées, le nom de manipulaires » (trad. Alexis Pierron, 1853).



La traduction est trompeuse. Faisons le mot-à-mot : ἑκάστης δἀνὴρ chaque homme ἀφηγεῖτο marchait en tête χόρτου d’herbe καὶ ὕλης et de bois ἀγκαλίδα une brassée κοντῷ à une perche περικειμένην étant enroulée ἀνέχων tenant droit = chacun marchait en tête en levant une brassée d’herbe et de bois enroulée sur une perche ; μανίπλα des manipules ταύτας [sous-entendu : ἀγκαλίδας] celles-là (ces brassées-là) Λατῖνοι les Latins καλοῦσιν appellent = les Latins appellent ces brassées des manipules.


Disons les choses en termes modernes : d’un côté, une brassée ou une poignée d’herbes que l’on appelle manipulus ou manipulum en latin – sens conservé en français dans le Littré : « ce que la main peut tenir d'herbes, de fleurs, de graines » ; d’une autre côté, le dérivé manipularius, au pluriel manipularii, pour désigner les soldats faisant partie de cette poignée d’hommes. Aucun texte ne dit expressément que le mot manipulus est synonyme de signum. Les textes disent simplement qu’anciennement, à la place d’étendards (pro signis), on utilisait des manipules, des poignées d’herbes sur une perche : pro signis gerebant, pro signis faciebant. À l’époque classique, on utilisait le mot signum, pl. signa, pour désigner l’étendard des manipules : « the signa are the standards of the maniples within each cohort, and usually consisted of a spear-head on a pole, bearing various decorations. These were used mainly as a rallying point in battle for the smaller units [...] » (N.P. Miller, Tacitus: Annals Book I, Bradda Books Ltd., 1978, comm. ad Ann. I, 18, 2).


En plus de signum (Gaffiot, 4e sens : enseigne, drapeau, étendard), le latin utilise vexillum et, plus tardivement, labarum pour désigner les étendards des armées romaines. D’ailleurs, le Franqus a le mot vexille, défini ainsi : « Antiq. rom. Étendard des armées » et il a même le mot labarum (même définition que dans le TLFi: « Étendard impérial romain sur lequel figure une croix et le monogramme du Christ, adopté à la suite d'une vision prémonitoire que Constantin aurait eue de sa victoire sur Maxence) ».


Bref, le sens d’« étendard » donné à manipule tant en français qu’en latin est pour le moins peu attesté.

 
On ne peut juger un dictionnaire sur un seul mot. Le hasard a pu me faire tomber sur un cas tout à fait exceptionnel. Est-ce suffisant pour inviter à la prudence ?

lundi 8 octobre 2012

À la hauteur des attentes : première incursion dans le dictionnaire Franqus



Le supplément sur les dictionnaires du Devoir des 29-30 septembre nous apprenait que le dictionnaire Franqus était accessible gratuitement en ligne pour une période d’essai.


Au départ, je n’avais pas l’intention de publier des commentaires car, question de principe, je ne tiens guère à améliorer bénévolement avant sa parution un dictionnaire qui a déjà coûté plusieurs millions aux contribuables québécois (une bonne dizaine si mes calculs sont exacts, et cela exclut les prêts de service de la part de l’Office québécois de la langue française). Plus téméraire que l’auteur du blog Les Mystères du français[1] qui attend la publication officielle pour se prononcer, je cède à la tentation de mettre en ligne quelques commentaires sur cet ouvrage qu’on attendrait « depuis 1914 », à en croire une page que l’on pouvait lire sur le site de Franqus il y a encore peu de temps.


Remarque préliminaire : le titre officiel du Franqus est Dictionnaire de la langue française, avec comme sous-titre : Le français vu du Québec. Curieuse formulation. C’est comme si on disait : la Terre vue de Sirius. En d’autres termes, le français, corps étranger, tel qu’on le voit à partir du Québec. Et non ce que l’on attend de trouver dans ce dictionnaire : le français tel qu’il est en usage au Québec. L’avantage de la formulation de l’équipe Franqus, c’est qu’elle permet de faire l’impasse sur la question de l’existence d’une situation de diglossie au Québec – sujet trop vaste pour que je m’y aventure dans ce billet.


Le hasard a fait que l’un des premiers mots que j’ai cherchés dans le Franqus a été Fête-Dieu. Je donne la définition du Franqus et celle du Trésor de la langue française informatisé (TLFi) :



Franqus
Trésor de la langue française informatisé
Fête-Dieu
Fête catholique commémorant la présence de Jésus-Christ dans l’hostie consacrée, célébrée le deuxième dimanche suivant la Pentecôte.
Fête-Dieu, fête du Saint(-)Sacrement. Solennité instituée en l'honneur du sacrement de l'Eucharistie et fixée au jeudi qui suit l'octave de la Pentecôte.



Célébrée le deuxième dimanche suivant la Pentecôte ? Le Franqus ne suit pas le TLFi qui fixe la célébration de cette fête un jeudi.


Or, le mercredi 10 juin 2009, le cardinal Jean-Claude Turcotte (archevêque de Montréal) écrivait :

Demain soir, plusieurs centaines de personnes se réuniront à la Basilique Notre-Dame afin de célébrer la Fête-Dieu. Cette année encore, la célébration se déroulera en trois temps : messe à Notre-Dame à 19h30, procession eucharistique en direction de la Basilique Saint Patrick où la soirée se terminera par la bénédiction du Saint-Sacrement[2].


En 2009, la Fête-Dieu a donc été célébrée à Montréal le jeudi 11 juin. À Québec, la Fête-Dieu a été célébrée en 2010 le jeudi 3 juin[3].


Alors d’où vient l’affirmation du Franqus voulant que la Fête-Dieu soit célébrée le deuxième dimanche suivant la Pentecôte ? On trouve la réponse dans Wikipédia : « Les origines de la Fête du Corps et du sang du Christ, célébrée le jeudi après le dimanche de la Sainte-Trinité (en France, le dimanche suivant, en vertu d'un indult papal), remontent au XIIIe siècle. » Partout dans le monde, la Fête-Dieu se célèbre un jeudi, sauf en France. Pour ce mot, le Franqus est bien fidèle à son sous-titre, il présente le français (de France) à partir du Québec, il ne rend pas compte de la réalité québécoise.




Après cette découverte étonnante, j’ai poursuivi mon exploration du vocabulaire religieux dans le Franqus. Disons tout de suite que le Franqus n’a pas suivi l’exemple (fort critiqué) du Dictionnaire québécois d’aujourd’hui qui définissait en long et en large les sacres et en donnait de nombreux exemples. Au contraire, il les cache d’un voile pudique, se contentant à chaque fois d’indiquer tout simplement « Voir l’article thématique Les sacres en français québécois » (où on vous expliquera que le sacre est « une ressource privilégiée par les Québécois pour l’expression des émotions »).


Pour m’aider à dresser une liste de mots, j’ai consulté les sites Internet des diocèses de Québec, de Montréal et de Sainte-Anne-de-la-Pocatière.



Franqus
Trésor de la langue française informatisé
Diacre permanent
(absent)
(Diacre permanent est absent mais on trouve la définition suivante :)
Laïque qui exerce le diaconat à titre de fonction permanente. Nous entendons parler d'ordination de diacres. Ce sont des laïcs et qui le restent destinés au service des pauvres et qui secondent le clergé dans leurs fonctions sociales, liturgiques au besoin (É. Wehrlin ds Vie Lang., 1972, no 241, p. 226).
Diaconat permanent
(absent)
(Diaconat permanent est absent mais on trouve la définition suivante :)
B. [Le diaconat considéré comme un état] Fonction ministérielle permanente exercée dans l'Église catholique
(Projet) catéchétique
(absent)
Adj. Qui se rapporte à la catéchèse.
Catéchuménal
(absent)
(absent)
Réconciliation
Acte par lequel un pécheur se réconcilie avec Dieu, avec l’Église.
Le sacrement de la réconciliation : le sacrement de pénitence.
Acte par lequel un pécheur se réconcilie avec Dieu, avec l'Église
Sacrement de la réconciliation. Synon. de sacrement de pénitence
Célébration de la Parole
(absent)
(absent)
Liturgie de la Parole
(absent)
(quatre attestations, p.ex. s.v. Évangile : Texte proclamé (lu ou chanté) notamment à la messe au cours de la liturgie de la Parole)



Le Franqus donne la définition ancienne de diacre : « […] clerc qui a reçu l’ordre du diaconat à titre transitoire (avant la prêtrise) ». Le TLFi offre la définition issue du concile Vatican II : « fonction ministérielle permanente exercée dans l'Église catholique ». Sur ce point, le TLFi, dont la version papier fut publiée de 1971 à 1994, reflète davantage l’usage contemporain.


La liste fait voir que tous les mots cités, sauf un, sont absents du Franqus. Pourtant, liturgie de la parole et célébration de la Parole sont très fréquents au Québec, il suffit de lire les rubriques nécrologiques de nos journaux pour s’en convaincre. On voit en outre que, malgré ce que l’on a pu lire dans le supplément du Devoir du 29 septembre («Toutes les définitions sont de notre cru, nous n’avons rien emprunté aux autres dictionnaires»), la définition que le Franqus donne de réconciliation est exactement la même que celle du TLFi. Ce qu’illustrent aussi les exemples suivants :



Franqus
Trésor de la langue française informatisé
Confirmand
Personne qui va recevoir le sacrement de la confirmation.
Personne qui va recevoir le sacrement de la confirmation.
Nonce
Ecclésiastique ambassadeur du Saint-Siège auprès d'un gouvernement étranger.
Ecclésiastique ambassadeur du Saint-Siège auprès d'un gouvernement étranger.
Custode
Boîte à paroi de verre dans laquelle on enferme l'hostie pour l’exposer ou la transporter
Boîte à paroi de verre dans laquelle on enferme l'hostie



En ce qui concerne la définition du dernier mot, elle est en apparence plus complète dans le Franqus (mots ajoutés en rouge) mais les deux dictionnaires ne rendent pas compte du sens contemporain de « petite boîte ronde en métal précieux ou doré ou émaillé » (Wikipédia) (donc, pas de paroi de verre) utilisée pour porter la communion au domicile des malades.


Enfin un dernier exemple :



Franqus
Trésor de la langue française informatisé
Onction






1 Geste rituel de certains sacrements qui consiste à appliquer de l'huile sainte à une personne pour lui conférer un caractère sacré ou des grâces particulières.




2 LITTÉR. Douceur empreinte de piété dans les gestes et expressions.
I. Action d'oindre; résultat de cette action.
A.
Action d'enduire (une partie ou la totalité du corps d'une personne) d'une substance grasse. Appliquer un baume au moyen d'onctions.
B. Geste rituel entrant dans l'administration de certains sacrements, dans certaines cérémonies religieuses (de l'Antiquité, de l'Orient, de la liturgie catholique), et qui consiste à appliquer de l'huile sainte à une personne pour lui conférer un caractère sacré ou des grâces particulières.
II. Au fig.A. Caractère de douceur des gestes, de l'expression qui traduit la ferveur religieuse et porte à l'attendrissement, à la piété.
B. Péj. Douceur affectée, hypocrite.



Ce dernier exemple montre que les définitions du Franqus sont moins nombreuses (en termes techniques : on rend moins compte de la polysémie) et moins développées (j'ai indiqué en rouge les mots qui ont été retranchés de la définition du TLFi).


On peut conclure provisoirement de ce rapide survol d’une petite partie de la nomenclature du Franqus que le résultat est à la hauteur des attentes.



[1] Blog que j’ai découvert il y a peu et que je vous recommande.
[2] Source : http://www.diocesemontreal.org/publications/courriel-du-mercredi/lire/items/la-fete-dieu.212.html
[3] http://www.ecdq.tv/fr/videos/8e2cfdc275761edc592f73a076197c33