mardi 13 septembre 2011

Le miroir aux alouettes


Et si, à un linguiste qui nous dirait « je décris le français », nous demandions « lequel ? », il ne pourrait pas répondre « le vrai ». Le problème est qu’il n’oserait pas répondre « le mien », ce qui est souvent, hélas, le cas…
Louis-Jean Calvet, pagesperso-orange.fr/Louis-Jean.Calvet/, 4 juillet 2009

            Circule depuis plusieurs années dans les cercles aménagistes l’idée qu’il faut décrire « en soi », c’est-à-dire sans référence externe, le français du Québec – « comme si notre français était le seul qui existât » (cité dans Présence francophone, no 27, 1985, p. 39 ; on notera au passage que l’usage de l’imparfait du subjonctif montre que l’aménagisme peut s’accompagner d’une certaine afféterie). Cela signifie, en matière de vocabulaire, qu’il faudrait décrire non seulement la partie du lexique qui distingue le parler québécois de l’usage des autres francophones mais aussi la portion qui est commune. En pratique, cela revient à refaire les définitions de mots aussi communs que table, chaise, couteau, etc. C’était d’ailleurs l’objectif que s’était fixé à ses débuts l’équipe Franqus.


            Un autre thème récurrent est celui de la nécessité d’une description « complète » du français québécois :

Contrairement aux Français, les Québécois ne possèdent donc pas encore une description scientifique complète du français utilisé dans leur communauté linguistique. Ils ne disposent pas de cet outil de référence essentiel qui pourrait les renseigner sur l'usage correct d'ici. (Cité dans l’avis L’aménagement de la langue : pour une description du français québécois du Conseil de la langue française, 1990, p. 27)

À l'heure actuelle, il n'existe aucune description scientifique complète du français utilisé au Québec; seuls quelques résultats partiels sont disponibles ou accessibles.
[…] l'énoncé met en relief l'absence d'une description scientifique complète du français aujourd'hui utilisé au Québec. (Énoncé d’une politique linguistique relative aux québécismes, OLF)

« Mais comme notre but n’est pas de critiquer de façon détaillée les énoncés de politique de l’Office, nous nous contenterons simplement de faire observer que la différenciation entre québécismes récents et québécismes anciens devrait s’appuyer sur une description complète du français québécois. » (p. 77 d’un mémoire que j’ai cité dans un billet que j’ai dû retirer quand on a dépêché chez moi un alguazil – comme vous voyez, je continue à filer la métaphore hispanique)

Pourtant…


Pourtant, comme l’écrit Diane Vincent, qu’on ne peut soupçonner d’être anti-aménagiste : « Le français québécois est probablement la variété de français qui a fait l’objet du plus grand nombre de recherches systématiques » (actes du colloque Le français dans sa diversité, Québec, 2008, p. 131).

Et le français standard est l’une des langues du monde les mieux décrites.
Pablo Picasso, Costume des alguazils
(http://www.painting-palace.com/fr/paintings/29383)

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