Dans son énoncé de politique sur les emprunts linguistiques, l’Office
québécois de la langue française (OQLF) précise que l’emprunt doit être
« légitimé ». Qu’est-ce à dire ? À la page 25 du document, on
nous apprend qu’un emprunt légitimé est un « emprunt linguistique reçu
dans la norme sociolinguistique d’une langue, accepté par la majorité des
locutrices et des locuteurs d’une collectivité donnée. » La
majorité des Québécois utilisent des anglicismes comme joke, à date,
coconut, céduler, set de vaisselle, etc. : ils sont « généralisés »
et « implantés » (sic, c’est une tautologie) ainsi qu’utilisés
par la grande majorité des Québécois depuis bien plus de 15 ans. Et si les mots
ont un sens, les anglicismes qui figurent depuis des décennies dans des textes
de loi et dans des textes normatifs (pensons aux conventions collectives)
doivent donc être aussi considérés comme légitimés.
À quelques reprises, la Politique de l’emprunt linguistique
parle d’emprunts rejetés parce qu’ils sont « non légitimés » (p.ex.
p. 16), sans plus d’explication. On ne sait pas qui décide de cette
non-légitimation.
Dans sa défense de la position de l’Office publiée dans Le Devoir
hier, Monique Cormier lève un coin du voile sur la légitimation des anglicismes :
Seuls sont finalement admis les emprunts qui sont
d’usage standard, couramment acceptés, voire valorisés dans les meilleurs
écrits qui servent de référence au Québec et qu’on peut retrouver* dans des
ouvrages tels que le Multidictionnaire de
la langue française et Usito.
Madame Cormier n’a pas vu le problème que pose son affirmation. C’est
que le document Politique de l’emprunt linguistique donne comme exemples
d’anglicismes qui sont désormais acceptés par l’Office des mots qui sont
précisément refusés par le Multidictionnaire comme pâte à dents, démoniser
et papier sablé. Disons que l’argument invoqué par madame Cormier manque
de cohérence.
Quant au dictionnaire Usito, il a l’habitude de signaler tous les mots
qui, un jour ou l’autre, ont été critiqués. Il est difficile de l’invoquer pour
appuyer le nouveau laxisme de l’OQLF.
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* Pour les retrouver, il faut d’abord les avoir perdus.
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