Cette année encore, l’équipe des dictionnaires Oxford a préparé une liste des dix mots qui ont marqué
l’année 2016. J’ai mentionné dans le billet précédent le mot qui a été désigné
mot de l’année 2016 : post-truth. Le mot, apparu il y a une décennie, est devenu à la mode lors de l'élection présidentielle américaine.
Voici un tableau présentant les neuf autres mots et les équivalents proposés
par le Grand
Dictionnaire terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française
(OQLF) pour les rendre en français – lorsque le mot a été traité par les
terminologues de l’OQLF, ce qui ne fut le cas que de deux mots sur dix en 2016.
La situation s’est donc détériorée par rapport à celle de l’année précédente
(voir mon billet « Les mots de l’année 2015 »).
Mot
anglais (ou étranger)
|
Définition
donnée par l’équipe d’Oxford et résumée par la BBC*
|
Équivalent proposé par le GDT
|
Définition
donnée par le GDT
|
Adulting
|
The practice of behaving in a way characteristic of a responsible
adult, especially the accomplishment of mundane but necessary tasks
|
||
Alt-right
|
An ideological grouping associated with extreme conservative or
reactionary viewpoints, characterized by a rejection of mainstream politics
and by the use of online media to disseminate deliberately controversial
content
|
||
Brexiteer
|
A person who is in favour of the UK withdrawing from the European
Union
|
||
Chatbot
|
A computer program designed to simulate conversation with human users,
especially over the internet
|
Assistant virtuel, assistant
conversationnel, assistant intelligent, assistant personnel
|
Programme informatique
conçu pour répondre aux questions qui lui sont transmises ou pour exécuter
des tâches au moyen du langage naturel.
|
Coulrophobia
|
Extreme or irrational fear of clowns
|
Coulrophobie
|
Peur exagérée et irrationnelle des
clowns
|
Glass cliff
|
Used with reference to a situation in which a woman or member of a
minority group ascends to a leadership position in challenging circumstances
where the risk of failure is high
|
||
Hygge
|
A quality of cosiness and comfortable conviviality that engenders a
feeling of contentment or well-being, regarded as a defining characteristic of
Danish culture
|
||
Latinx
|
A person of Latin American origin or descent, used as a gender-neutral
or non-binary alternative to Latino or Latina
|
||
Woke
|
Originally in African-American usage meaning alert to injustice in
society, especially racism
|
*Source : http://www.bbc.com/news/uk-37995600
Notes sur quelques mots de la liste
précédente :
Wikipédia
nous apprend que « [l]Le préfixe coulro‑ vient du grec ancien κωλοϐαθριστής / kôlobathristếs
signifiant 'acrobate qui est sur des échasses' ». Étymologie
curieuse : les lettres κω équivalent en français à kô / cô, non à cou et je ne vois pas d’où peut bien
provenir le r de coulro‑. Le mot κωλοϐαθριστής est un mot composé ; la première
partie est κῶλον, que l’on trouve dans le français côlon. Le sens premier de κῶλον est « membre d’homme ou d’animal ».
Le mot coulrophobie est une absurdité étymologique. Cela a échappé à l'équipe du GDT*.
Quant aux équivalents
proposés par le GDT pour chatbot (chatter bot), ils ne sont que des
traductions littérales des synonymes anglais intelligent virtual assistant,
virtual assistant et intelligent agent.
Le
hygge posera un problème intéressant
aux terminologues du GDT : oseront-ils accepter l’emprunt intégral du mot
danois malgré sa difficulté à le prononcer en français ? Le mot se
prononce [ˈhuːɡə] en anglais, [ˈhyɡ̊ə] en danois. À
laquelle de leurs règles relatives à l’emprunt des formes étrangères auront-ils
recours dans ce cas ? La difficulté de prononcer le mot en français
sera-t-elle un facteur de rejet ?
J’écrivais l’année dernière :
On a […] pensé à une époque que le Québec,
étant aux avant-postes de la francophonie, avait pour rôle de proposer au monde
francophone des équivalents aux néologismes américains, ce qui avait entraîné
dans les années 1970 la création d’une équipe de néologie à l’Office (pas
encore québécois) de la langue française. Époque révolue.
Je me dois de tirer la même conclusion cette année.
________
* L’Online Etymology Dictionary précise :
Ancient Greek words for
"clown" were sklêro-paiktês,
from paizein "to play (like a
child);" or deikeliktas. Greek
also had geloiastes "a jester,
buffoon" (from gelao "to
laugh, be merry"); there was a khleuastes
"jester," but it had more of a sense of "scoffer, mocker,"
from khleuazo "treat with
insolence." Other classical words used for theatrical clowns were related
to "rustic," "peasant" (compare Latin fossor "clown," literally "laborer, digger,"
related to fossil).
Coulrophobia looks suspiciously like
the sort of thing idle pseudo-intellectuals invent on the internet and which
every smarty-pants takes up thereafter; perhaps it is a mangling of Modern
Greek klooun "clown," which is the English word borrowed into Greek.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire