mardi 28 octobre 2025

Tenir les cordons du poêle


Récemment, au cours d’une recherche, je suis tombé sur une expression que je ne connaissais pas : les coins du poêle, tenir les coins du poêle.

Usito définit ainsi poêle :

 


Comme à son habitude, Usito présente une version tronquée de la définition du Trésor de la langue française informatisé (TLFi) :

RELIG. CATH.

A. − Drap funéraire de couleur noire pour un adulte, blanche pour un enfant, qui recouvre un cercueil lors d'une cérémonie mortuaire, et dont les cordons sont tenus par des assistants durant le cortège. Le cercueil était porté par des marins, et entouré par les autorités de Saint-Malo, qui tenaient les cordons du poêle funèbre (J.-J. Ampère, Corresp., 1848, p.166).

Comparaison :

TLFi : Drap funéraire de couleur noire pour un adulte, blanche pour un enfant, qui recouvre un cercueil lors d'une cérémonie mortuaire, et dont les cordons sont tenus par des assistants durant le cortège.

Usito : Drap mortuaire, noir pour un adulte, blanc pour un enfant, recouvrant un cercueil lors de funérailles.

Le TLFi a été publié entre 1971 et 1994. Usito est un ouvrage en ligne (depuis 2009), pouvant en principe être mis à jour régulièrement. Il est donc curieux de constater qu’Usito ne signale pas que l’acception de poêle « drap funéraire » est vieillie, la coutume de tenir les coins d’un drap funéraire ayant même disparu  avec le drap lui-même. Pourtant les promoteurs d’Usito n’ont cessé de vanter leur système de marquage des mots qui, dans le cas présent, est déficient.

Source : Fédération québécoise des sociétés de généalogie

Le dictionnaire de l’Académie, dont on a l’habitude de se gausser, offre une définition qui tient davantage compte des coutumes contemporaines :

Drap mortuaire noir ou violet dont on couvre le cercueil lors des cérémonies funèbres. Expr. Tenir les cordons du poêle, naguère, tenir les cordonnets reliés à ce drap et, aujourd’hui, marcher à côté du cercueil ou immédiatement derrière.

Je n’ai trouvé qu’une attestation récente de coins du poêle dans la presse québécoise, encore s’agit-il d’une citation d’un texte de 1918 : « porteurs des coins du poêle » (Aux quatre coins, Journal communautaire d’Ascot Corner, avril 2014, volume XXIX/3).

Dans le Bulletin du parler français au Canada (avril 1903, dans la section « Sarclures »), j’ai trouvé cette citation : « Les coins du poèle étaient six pompiers. » Avec cette critique : « On écrit poêle. Et puis, des pompiers qui sont des coins de Poêle !... Lisez : “ Les coins (ou les cordons) du poêle étaient portés (ou tenus) par six pompiers” ». Oublions le fait qu’il y avait six coins… La graphie critiquée, poèle, est pourtant celle que l’on trouve dans Littré (« poèle : Drap dont on couvre le cercueil pendant les cérémonies funèbres, et dont quelquefois, par honneur, les coins sont tenus, pendant la marche du convoi, par certaines personnes »).

 

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