Je tombe sur ce texte traitant des niches fiscales dans le blog de mon ami Robert Chaudenson :
La niche est, de façon commune, la maison du chien. Toutefois, on ne voit pas comment le fisc peut s'introduire dans une telle métaphore, le contribuable étant moins, en général, un chien qu'un cochon (de payant) ! Certes, on est porté à penser que nombre de ces niches sont occupées par des molosses, à voir la crainte qu'elles inspirent à tous ceux qui semblent avoir l'idée, sincère ou feinte, de leur porter atteinte ou de les supprimer. Pourtant, sans être un grand connaisseur en matière de chiens, j'observe que ces animaux préfèrent souvent se tenir n'importe où plutôt que dans la niche qui leur est en principe dévolue.
Si les chiens sont censés être les occupants de niches qu'ils délaissent souvent et volontiers, il est d'autres niches, celles des saints dont leurs occupants ne sortent guère. Elles ne constituent pas pour eux des abris ou des refuges, mais visent plutôt à les mettre en évidence, souvent dans des poses avantageuses ou traditionnelles, pour permettre à leurs admirateurs de venir les solliciter ou les prier.
J'incline à croire que, contre toute attente, celui qui a inventé cette expression et qui est assez modeste ou prudent pour ne pas se faire connaître, avait plutôt en tête les saints que les clébards, même si à voir la difficulté qu'il y a à y toucher ou même à s'en approcher, on pourrait penser qu'il s'agit plutôt des seconds que des premiers.
(« Fiscalité : niches à chiens ou niches à saints ? », 25 août 2011)
Et je me rends compte, une fois de plus, qu’au Québec nous avons traduit littéralement l’expression anglaise tax shelter et que ce calque est entériné à la fois par le Grand Dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française et par la base de données terminologiques Termium du Bureau de la traduction à Ottawa.
Comme l’écrivait Louis-Jean Calvet dans son site Internet, les Québécois ont tendance à parler anglais en français, « c'est-à-dire que la néologie se ramènerait souvent pour eux à la traduction, ou plutôt à ce qu'on appelle en termes techniques le calque » (24 juillet 2008). Sans le savoir, il ne faisait que reprendre ce que disait Jean-Paul Tardivel au XIXe siècle quand ce dernier dénonçait l’« habitude, que nous avons graduellement contractée, de parler anglais avec des mots français » (« L’anglicisme, voilà l’ennemi », 1879).
L'acculturation par la traduction est une forme de sujétion à une langue dominante qui conduit à l'appauvrissement du français par l'absence d'utilisation des ressources qui ne sont pas suggérées par l'anglais (cf. J. Poisson, Meta 20/1, p. 64).
Robert Dubuc et moi écrivions dans le document d’orientation préparatoire au colloque « Traduction et qualité de langue » organisé par le Conseil de la langue française : « la traduction implique davantage que le simple transcodage d'un message. Elle représente un affrontement culturel. Si cette rencontre s'opère toujours dans le même sens, il peut se développer un colonialisme culturel, par traduction interposée ».
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