Quand, l’année dernière, j’ai voulu évaluer
la version d’essai du dictionnaire Franqus, depuis curieusement renommé Usito,
je l’ai fait à partir d’exemples que me fournissaient mes lectures quotidiennes
de la presse. Je soumets aujourd’hui le Grand Dictionnaire terminologique (GDT)
de l’Office québécois de la langue française (OQLF) au même traitement. Voici,
dans leur contexte, quelques mots trouvés dans l’édition d’aujourd’hui du Devoir et qui ne sont pas traités dans
le GDT ou le sont de façon insatisfaisante.
Gavage télévisuel
« Le
gavage télévisuel, c'est-à-dire
l'écoute de plusieurs épisodes d'une émission en rafale, est sans aucun doute
un phénomène qui a pris de l'ampleur en 2013. » (Cassandra
Szklarski, « Le ‘gavage télévisuel’ a pris de l’ampleur
eu 2013 », Le Devoir, 4 janvier 2014
Le terme gavage télévisuel est absent du GDT.
Le dictionnaire en ligne Reverso.net parle
de visionnage compulsif et de visionnage excessif, termes eux aussi
absents du GDT.
Wedge politics
« Électoralisme, cynisme, ‘ wedge
politics ’ qui s’apparentent
aux tactiques de Stephen Harper, gains à court terme quitte à risquer une
fracture sociale, tant Philippe Couillard que François Legault n’ont pas manqué
de dénoncer le gouvernement Marois. » (Robert Dutrisac, « Les partis
prennent leurs marques », Le Devoir, 4 janvier 2014)
Le GDT donne comme traduction politique de la division. En faisant des
recherches sur Internet, j’ai trouvé de meilleurs équivalents : politique de la zizanie et politique du clivage :
« Importée des Etats-Unis (Hofstadter 1964; Medvic 2001;
Frank 2007; Westen 2007), la ‘politique
du clivage’ consiste à mousser certains enjeux viscéraux tels que
l’avortement, les armes à feu, le mariage de même sexe, la religion ou
l’immigration. » (Le Carnet d’Alexandre,
1er juin 2010)
Millenial
« Après une première diffusion à Super
Écran, la version française de la comédie dramatique américaine Girls aboutit à Artv (mardi,
22 h) au moment même où la troisième saison prend son envol sur HBO.
Qualifiée de Sex and the City de la génération Y (ceux que les anglophones
appellent les « millenials »),
ou a contrario d’anti-Sex and the City, cette série créée
par la toute jeune Lena Dunham, sous la houlette du réalisateur et producteur
Judd Apatow, plaît ou horripile celui qui s’y attarde. » (Amélie Gaudreau,
« Rendez-vous télévisés tout neufs pour rentrée hâtive », Le
Devoir,
4 janvier 2014)
Si le GDT a bien une fiche génération Y, il n’a pas enregistré millenial comme synonyme anglais de Y generation.
Hippsters
« On y suit les tribulations professionnelles
mais surtout amoureuses de quatre jeunes femmes fraîchement diplômées au temps
du téléphone intelligent et du cul-de-sac économique post-2008 dans un Brooklyn
peuplé de hipsters paumés. » (Amélie Gaudreau, « Rendez-vous
télévisés tout neufs pour rentrée hâtive », Le
Devoir,
4 janvier 2014)
Le GDT ne traite pas le mot anglais hippster que l’Urban Dictionary définit
ainsi :
Hipsters
are a subculture of men and women typically in their 20's and 30's that value
independent thinking, counter-culture, progressive politics, an appreciation of
art and indie-rock, creativity, intelligence, and witty banter. The greatest
concentrations of hipsters can be found living in the Williamsburg, Wicker
Park, and Mission District neighborhoods of major cosmopolitan centers such as
New York, Chicago, and San Francisco respectively.
Ces quelques notes de lecture, qui s’ajoutent
aux remarques faites dans mon billet « Mots nouveaux, maux anciens »,
m’amènent à poser la question suivante : la néologie serait-elle devenue
la parente pauvre du GDT ?
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