Comme
je l’ai déjà dit dans ce blog, faire et défaire c’est toujours travailler. Voici
un nouvel exemple de l’application de cette maxime dans le Grand Dictionnaire
terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française (OQLF).
Je
viens de tomber sur une page de la Gazette officielle du Québec du
26 mai 1979. On y trouve un avis de normalisation de l’Office (pas encore
québécois) de la langue française sur la terminologie des boissons gazeuses. J’en
retiens cette définition du terme nectar : « boisson résultant
d'une addition d'eau et de sucre à un jus de fruit pratiquement non consommable
à l'état pur comme boisson en raison de son caractère naturellement trop
pulpeux ou trop acide. » On trouve exactement la même définition dans le
Trésor de la langue française informatisé (TLFi) à un mot près : « produit
résultant d'une addition d'eau et de sucre à un jus de fruit pratiquement non
consommable à l'état pur comme boisson en raison de son caractère trop pulpeux
ou trop acide ». Le TLFi a tiré cette définition du Dictionnaire des
industries alimentaires de J.M. Clément (Paris, Masson, 1978). Une fiche du
GDT qui a échappé à l’attention des révisionnistes précise que « les
fruits pouvant produire un nectar appartiennent aux espèces suivantes :
abricot, pêche, prune, quetsche, goyave, groseille, baies sauvages, grenadille,
cerise aigre, cassis et framboise. »
L’OQLF
a été saisi dans la décennie 2010 d’une frénésie de désofficialisation. C’est
ainsi que le terme nectar a non seulement été désofficialisé le 15
février 2014 mais qu’on a aussi changé sa définition : « boisson non
gazéifiée à base de jus concentré ou de purée de fruits, auxquels on ajoute de
l'eau et du sucre ». Selon cette définition, les jus reconstitués (jus
concentrés additionnés d’eau) qu’on trouve couramment dans le commerce
pourraient s’appeler nectars.
La
banque terminologique Termium du gouvernement fédéral canadien a plus ou moins
avalisé ce nouveau sens. Si le nectar d’abricot y est défini comme
résultant de l’« addition d'eau et de sucre à un jus de fruit très
concentré et pulpeux » (on omet « non consommable à l’état pur »),
le nectar de pomme y est présenté comme une « boisson à base de jus ou de purée de fruits, d'eau et de
sucre ».
Comme le GDT, Termium a conservé une trace de l’ancienne
définition. Le nectar de cachiman épineux (envie d’en boire ?) a la
note suivante : « l'appellation ‘nectar’ est réservée au produit
résultant d'une addition d'eau et de sucre à un jus de fruit pratiquement non
consommable à l'état pur comme boisson en raison de son caractère naturellement
trop pulpeux ou trop acide ».
Le plus
curieux dans toute cette histoire, c’est la note de la fiche du GDT : « Si
le nectar est composé d'une seule sorte de fruit, on écrira un nectar de
fruit. S'il est composé de plusieurs sortes de fruits, on écrira plutôt un nectar
de fruits. » S’il n’y a qu’un seul fruit, pourquoi ne pas indiquer
lequel ? En fait, la note est mal rédigée. Il fallait écrire : on
écrira le nom du fruit au singulier.
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