Dans la dernière livraison de L’expression juste, le
président-fondateur de l’Association pour le soutien et l’usage de la langue
française (Asulf), M. Robert Auclair, écrit :
Plusieurs
membres de l’Association ont fait part depuis un certain temps de leur
agacement de voir le mot « détour » omniprésent dans l’affichage
public au Québec. L’explication de cette situation intolérable a déjà été
donnée [par] Robert Dubuc […] dans L’Expression
juste de septembre 2007 sous le titre « Une déviation
de l’Office ».
M. Auclair
cite ensuite un passage de cet article. En voici un extrait plus long :
Au
Québec, nous avons adopté le français comme langue officielle. Ce faisant, nous
avons adopté le code grammatical et le lexique qui sont l’apanage de cette
langue. Aussi faut-il s’inquiéter lorsqu’un organisme officiel, mandaté par la
loi pour promouvoir et défendre l’intégrité de cette langue sur notre
territoire, cautionne des écarts à la norme générale. C’est ce qui s’est
produit lorsque le Conseil d’administration de l’Office québécois de la langue
française, revenant sur une décision antérieure et contrevenant à l’avis donné
par sa Commission de terminologie, a officialisé l’emploi du mot détour dans la
signalisation routière.
Depuis
1884, selon Le Robert, pour désigner le chemin que doivent prendre les
véhicules lorsque la voie principale est bloquée, on utilise en français le
terme DÉVIATION. Au début des années quatre-vingt, lorsque l’Office, avec le
concours des ministères intéressés, a décidé d’aligner le vocabulaire de la
signalisation routière sur l’usage général du français, le mot « détour »,
d’utilisation usuelle jusque-là, a été remplacé par DÉVIATION, comme il se
devait. Mais les fonctionnaires responsables de l’affichage routier ont
toujours montré beaucoup de résistance à ce changement. En dépit des avis de
l’Office, l’utilisation de « détour » restait courante. L’Association
pour le soutien et l’usage de la langue française a harcelé les autorités
compétentes pour que la décision de l’Office soit respectée. Or au lieu de se
conformer à l’usage général du français, les fonctionnaires sont revenus à la
charge pour faire changer le décret de l’Office. C’est devant ces pressions que
l’Office, contre l’avis de sa Commission de terminologie, a décidé de ratifier
l’usage du mot DÉTOUR en signalisation routière. C’est conforme au nouveau leitmotiv
de l’Office : « Ne pas faire de vagues ».
Qu’est-ce
qu’un détour en français? D’après les dictionnaires, c’est un parcours qui
s’écarte du chemin direct pour diverses raisons. On fait un détour pour visiter
des parents ou pour apprécier les beautés d’un site ou d’un paysage. Le mot
détour désigne encore les sinuosités naturelles d’un cours d’eau ou d’une
route. Ex. : La rivière fait de nombreux détours. Il n’y a pas là trace de
l’usage technique en signalisation routière. A-t-on besoin, on peut se le
demander, d’un Office québécois de la langue française pour ratifier les usages
locaux qui s’écartent de la norme du français ?
Les fonds publics pourraient servir à meilleur escient.
Robert Dubuc
Traducteur et
terminologue agréé
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