lundi 7 juillet 2025

Les endogénistes et le syndrome du fax


Cet été encore, Le Devoir nous sert sa « bien-aimée rubrique Point de langue », « à mi-chemin entre l’essai et la vulgarisation scientifique. » L’année dernière, j’avais exprimé des réserves sur ces chroniques (voir mes billets des 5 août 2024, 12 août 2024 et 19 août 2024).

La chronique du week-end dernier portait sur les mots job, fun et week-end. Je me contenterai de citer ce passage où l’autrice critique l’utilisation de l’expression c’est fun par des Québécois au lieu de c’est l’fun, d’usage courant depuis bien longtemps au Québec : « Pourquoi calquer notre usage d’une expression séculaire sur l’usage somme toute assez récent en France ? » (Le Devoir, 5 juillet 2025). On dirait que la chroniqueuse oublie que les locuteurs, même québécois, ne vivent pas en vase clos, ils ont facilement accès à des médias étrangers, ils voyagent et trimbalent des mots avec eux, des étrangers s’établissent chez eux et on parle même du Plateau Mont-Royal à Montréal comme étant le 21e arrondissement de Paris.

Les endogénistes (partisans d’une norme proprement québécoise) sont profondément ringards : voir mon billet « Le purisme pure-laine ou le Grand Bond en arrière ». Le purisme pure-laine cherche à maintenir en vie des mots ou des expressions qui tendent à disparaître en arguant du fait qu’ils étaient anciennement en usage au Québec. Ces puristes ont fréquemment recours à des citations de textes antérieurs au xxe siècle pour justifier leur conservatisme.

On trouve un parallèle de cette attitude dans le mode de communication des pharmaciens avec les médecins : pour le renouvellement des ordonnances ils continuent de recourir au fax, technologie dépassée depuis des lustres partout ailleurs qu’au Québec. J’utilise sciemment l’anglicisme fax car il n’y a plus lieu de se battre pour imposer un terme français pour désigner un appareil qui aurait dû disparaître depuis longtemps.

Certains commentateurs sont victimes du syndrome du fax, ils se refusent à la modernité.