À gauche : ambulateur, déambulateur ou marchette (rollator); à droite : cadre de marche (walker) |
La fiche ambulateur du Grand Dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française amène à faire quelques constatations intéressantes. La notion d’ambulateur (en anglais rollator) est étroitement associée à celle de cadre de marche (en anglais walker). Comme le précise le GDT, « certains auteurs d'ouvrages spécialisés emploient l'un et l'autre [terme] indifféremment ».
La première constatation, c’est que mon logiciel de correction refuse le mot ambulateur alors qu’il accepte déambulateur.
La deuxième, c’est que le mot ambulateur dérive d’un verbe, ambuler, qui n’est plus guère usité en français contemporain : le Trésor de la langue française informatisé le qualifie de vieux et de littéraire. La dernière citation qu’il en fait date de 1883. Il lui attribue une fréquence de 4, comparativement à 72 pour déambuler. Pas étonnant que spontanément les locuteurs emploient un nom qui dérive d’un verbe beaucoup plus fréquent.
La troisième observation montre tout simplement que tous les arguments sont bons quand on veut proposer un terme plutôt qu’un autre. L’auteur de la fiche du GDT fait valoir que « déambulateur […] ne manque pas d'évoquer, à l'instar du verbe déambuler dont il est dérivé, l'aide qui permettrait à une personne de ‘ marcher sans but précis, selon sa fantaisie ’ ». Raison pour laquelle il faudrait lui préférer ambulateur, dérivé du verbe ambuler. Pourtant ce dernier verbe signifie « marcher selon le rythme de la promenade, sans hâte et souvent sans but » (Trésor de la langue française informatisé). Comprenne qui pourra le subtil distinguo à la base de la préférence oqulfienne.
Quatrième observation : le terme ambulateur proposé par l’Office est, de tous les termes utilisés pour désigner ces deux objets, le moins fréquent dans les pays francophones (à l’exception du belgicisme tribune, que la fiche du GDT ne mentionne d’ailleurs pas). Pour singulariser le Québec dans la francophonie, on ne saurait faire mieux. Il est faux de prétendre, comme le fait le GDT, que « le terme ambulateur [est] déjà bien implanté » : le tableau ci-dessous prouve le contraire.
Terme | Tout Google (langue : français) | Langue : français, Domaine : .ca | Langue : français, Domaine : .fr | Langue : français, Domaine : .be |
Nombre de résultats | ||||
Ambulateur | 8 800 | 6 650 | 1 720 | 152 |
Déambulateur | 404 000 | 46 800 | 303 000 | 92 700 |
Cadre de marche | 184 000 | 10 200 | 105 000 | 57 600 |
Rollator | 714 000 | 21 400 | 208 000 | 75 200 |
Marchette* | 184 000 | 57 300 | 12 100 | 2 690 |
Tribune** | 27 000 | 2 | 3 060 | 18 100 |
* Lorsque le contexte ne comprend pas le mot enfant
** Lorsque figure dans le contexte le terme cadre de marche
Résultats Google le 5 octobre 2011
Sauf erreur de ma part, car je n’ai pas cherché dans toutes les éditions du Larousse et du Robert, seul le mot déambulateur y est présent. Il en va de même pour le Trésor de la langue française informatisé. J’ai lu quelque part que le mot marchette figurerait dans le Dictionnaire québécois d’aujourd’hui mais je n’ai que la 1re édition et le mot n’y apparaît pas entre marcher et… marde.
Une dernière observation, à propos du commentaire apparaissant en note sur la fiche du GDT : « Le terme rollator, emprunt intégral à l'anglais, en usage notamment en France, est à éviter en français puisqu'il s'intègre difficilement au système morphosémantique de cette langue et qu'il n'y comble aucune lacune terminologique […]». Le mot rollator s’intègre difficilement au système morphosémantique du français ? Du point de vue morphologique, le mot est spontanément perçu comme étant du genre masculin et il forme son pluriel par l’addition d’un ‑s. Du point de vue sémantique, on repère immédiatement la racine rol- qui a donné rôle, rouleau, roue (venant de rotulus, rota). On trouve, grâce au moteur de recherche Google, 3 720 pages où le mot rollator est francisé en rollateur, ce qui est déjà un indice d'intégration.
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