vendredi 5 mai 2017

Un raisonnement spécieux


Dans le précédent billet, j’ai traité de la réponse qu’a faite le président-directeur général de l’Office québécois de la langue française (OQLF) à la question que lui posait la députée Claire Samson mercredi dernier sur la dénomination Place Bell pour désigner un édifice de Laval (une salle omnisports). Le président lui a répondu : « … parce que l’Office a normalisé le sens de place au sens d’espace public, est-ce que c’est le seul usage que la population est en droit d’utiliser ? » Le président confond la langue courante et la langue standard, qui est celle de l’État et de ses organismes. Ce que le président ne dit pas, c’est que dans la langue courante, on n’a le plus souvent pas le choix, il faut recourir aux dénominations officielles : on ne peut pas dire que l’on fréquente le lycée du Vieux-Montréal quand c’est cégep, ou collège, qui désigne ce genre d’établissement d’enseignement au Québec. Si la Place Bell s’appelait, par exemple, le stade Bell, eh bien, on dirait spontanément, sans contrainte aucune : nous irons au stade Bell, et non nous irons à la Place Bell.  À Québec, nous allons à la Place Sainte-Foy, un centre commercial, mais aux Galeries de la Capitale, autre centre commercial. Nous n'avons pas le choix d'aller aux Galeries Sainte-Foy ou à la Place de la Capitale: car Place Sainte-Foy et Galeries de la Capitale, désignations officielles quoique la première soit incorrecte, « c’est le seul usage que la population est en droit d’utiliser », pour reprendre les mots du président, parce que tout autre créerait de l'ambiguïté. Par ailleurs, l'Office ne peut utiliser l'argument de l'usage pour justifier son inaction. Car la loi lui donne le pouvoir de normaliser les dénominations des lieux publics et il s'est déjà prononcé à deux reprises contre l'utilisation du mot place pour désigner un édifice. Un peu de cohérence et de courage, que diable!


Un autre élément de la réponse du président est discutable : « on a la Place des Arts, ah bon, c’est une place publique mais on parle des fois de l’édifice à côté comme étant l’édifice de la Place des Arts. » J’ai eu beau chercher, je me suis servi de Google Maps, je n’ai pas trouvé de place publique qui s’appelle Place des Arts. Même dans la banque de la Commission de toponymie (le président de l’Office est aussi président de cette Commission), il n’y a pas de « Place des Arts » comme place publique. On n’y trouve que la station de métro Place-des-Arts. En fait, la place publique devant la Place-des-Arts est une esplanade.


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