jeudi 13 mai 2021

Aboli bibelot d’inanité sonore

 Le ministre Simon Jolin-Barrette vient de présenter son projet de Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français. Pour l’heure, je ne veux commenter qu’un aspect de la proposition gouvernementale, l’abolition du Conseil supérieur de la langue française, à laquelle d’ailleurs je m’attendais.

Le Conseil supérieur de la langue française (CSLF) avait succédé en 2002 au Conseil (tout court) de la langue française. Ce dernier avait joué un rôle majeur dans la politique linguistique du Québec.

Dans ses premières années d’existence, le Conseil de la langue française (CLF) publiait bon an mal an une bonne dizaine d’études. Les avis qu’il présentait au ministre responsable de l’application de la Charte de la langue française avaient le plus souvent un grand retentissement médiatique. Rappelons seulement l’avis sur l’affichage public dont le premier ministre Robert Bourassa s’était servi pour justifier son utilisation de la disposition de dérogation en 1988 (« loi 178 »). Ou encore l’avis de 1993 suggérant au gouvernement, qui ne voulait pas reconduire la disposition de dérogation, d’imposer la « nette prédominance » du français dans l’affichage (« loi 86 »). Pour avoir une vision plus complète du travail accompli par le CLF, on peut lire l’ouvrage de Gérard Lapointe, Le Conseil de la langue française, 1978-1998.

En comparaison, le bilan du CSLF est plutôt mince. Il a publié discrètement quelques études qui ont eu peu d’échos dans les médias et dont on n’apprenait l’existence que par la consultation de son site Internet. Malgré tout, chaque année, il faisait parler de lui à l’occasion des prix et distinctions qu’il remettait (Prix Jules-Fournier, Ordre des francophones d’Amérique). Je retiendrai deux points de son action depuis 2002 :

 

• Le désaveu de l’indice de langue d’usage public (ILUP) concocté par son prédécesseur. Le CSLF a fini par condamner le recours à l’indice unique pour rendre compte de la situation linguistique du Québec même s’il a utilisé une formulation amphigourique dans le but de ménager la susceptibilité de personnes encore en poste. Mario Beaulieu, membre du Conseil au moment où celui-ci a redéfini sa position à l’égard des indicateurs de la situation linguistique, en ne se gênant pas pour condamner le rapport ILUP, a clairement montré comment il fallait interpréter la position de l’organisme : « Cette étude sur l’usage public du français correspond sans doute à une des tentatives les plus douteuses pour donner un portrait optimiste de la situation du français. Elle a été hautement contestée par les scientifiques à la fois dans ses objectifs et sa méthodologie. C’est également sur cette étude que se fonde l’avocat Brent Tyler pour affirmer que le français n’a plus besoin d’être protégé » (L’Aut’ Journal, n° 255, janvier 2007).

• Sa position sur la norme du français au Québec (pour une présentation plus détaillée voir mon billet « Le CSLF et la norme »).

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire