Sur
la liste de diffusion d’un réseau de sociolinguistique, il vient d’y avoir une
discussion sur l’usage du mot dialecte qui, en linguistique, n’est pas
(négativement) connoté, au contraire du mot patois. Mais, a-t-on fait
valoir, ce dernier terme n’est pas toujours péjoratif, la preuve, c’est qu’il y
a des associations qui ont pour objectif de revitaliser les patois. Peu
importe. Mais cet échange m’a donné l’idée d’aller vérifier si le sens québécois
de patois, « juron propre à une personne », avait été enregistré
dans le dictionnaire qui revendique de décrire le français en usage au Québec
et qui se targue d’avoir établi sa nomenclature à partir de corpus linguistiques
québécois. Résultat : Usito n’a pas enregistré le sens québécois de patois.
Ce qui, évidemment, n’est pas pour m’étonner puisque j’ai déjà signalé
plusieurs lacunes de ce genre.
Le
sens québécois de patois est bien attesté dans l’un des principaux
corpus de textes québécois, le fichier lexical du Trésor de la langue française
au Québec (TLFQ). Il est donc étonnant qu’il ait échappé à l’attention des
rédacteurs d’Usito.
Dans
les Croquis (1920) du frère Marie-Victorin, on trouve* le dialogue
suivant :
— Capitaine, demandait devant
moi un touriste anglais, au patron d'une goélette amarrée au quai du
Cap-aux-Meules, dites-moi donc pourquoi les gens des Îles [de la Madeleine]
ne sacrent qu'en Anglais ?
—
Les gens d'ici, répondit le marin en calant sa casquette, ne savent pas sacrer
en français. Ce sont les Anglais qui leur ont appris ces patois-là. Ils
n'en savent pas d'autres !
Dans
la base de données du TLFQ, on trouve aussi ces deux citations du livre
autobiographique de l’acteur André Montmorency, De la ruelle au boulevard
(1992) :
Qu'est-ce que
tu nous racontes là! Y a un personnage dans une pièce canadienne qui dit
«Câlisse» !!! C'est Dominique Michel qui vient de s'étonner. J'vous jure!
Pis c'est pas tout. Le patois du personnage principal, tenez-vous bien, c'est :
« Maudit verrat de bâtard ! ».
Souffrance éternelle, veux-tu ben me dire qu'est-ce qu'Alice fait là, rendue à tévé !!! Eh oui, le patois de Christian, j'en ai hérité d'elle. J'avais oublié qu'elle y ajoutait un éternelle à la fin.
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*À Sherbrooke, on écrirait plutôt qu’on retrouve le dialogue. C’est une particularité de la ville : on y perd tellement de choses qu’on ne finit plus de les retrouver.
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