vendredi 15 juin 2012

Premières impressions


Ainsi que je le mentionnais dans le billet précédent, l’Office québécois de la langue française a mis en ligne le 7 juin une nouvelle interface d’utilisation de son Grand Dictionnaire terminologique.


Je ne ferai pas de commentaires sur l’interface parce que, pour le faire, il faut l’avoir utilisée sur une assez longue période. Mais disons qu’à première vue elle impressionne. Les informaticiens ont fait un bon travail.


Mais pour ce qui concerne la terminologie proprement dite, les problèmes soulevés il y a seize mois par d’anciens terminologues de l’Office demeurent toujours (voir leur manifeste Au-delà des mots, les termes) et sont sans doute accentués par la nouvelle présentation des fiches terminologiques.


Prenons un exemple critiqué dans le manifeste des anciens terminologues : l’acceptation de chambre de bain comme équivalent français de bathroom. Rien n’a été changé, chambre de bain est même présenté maintenant comme « terme privilégié » au même titre que salle de bain :

Voici quelques autres notes résultant de mes premières consultations du nouveau GDT.


Paradoxe. Les termes qui étaient affublés, dans l’ancien GDT, de la marque « langue courante » sont maintenant rangés sous l’en-tête « termes à usage restreint ». Les termes peuvent donc être à la fois courants et d’usage restreint.



Confusion. Dans la fiche « parc technologique durable », on lit la note : « technoparc écologique et technoparc durable sont considérés comme des équivalences commerciales ». Des termes qui sont des équivalences ? Comprenne qui pourra. La confusion s’accroît, si cela est encore possible, quand on lit plus loin : « l'élément de formation éco- de même que l'adjectif écologique duquel il est issu, ne sont pas des synonymes de durable. » Écologique et durable ne sont pas synonymes mais sont quand même des « équivalences commerciales ».


Insouciance. Le 1er avril, je notais qu’il y avait des fautes d’anglais dans la définition du terme house league. On n’a apporté qu’une correction cosmétique en ajoutant l’article « a » au début de la définition :

Ancien GDT : « leaque [sans majuscule initiale, q au lieu de g], in U.S. english [sans majuscule], is an association of sports clubs or teams ».

Nouveau GDT : « A leaque, in U.S. english, is an association of sports clubs or teams ».


L’OQLF, qui se vante de ce que près de la moitié des consultations de son GDT vient de l’extérieur du Québec peut-il se permettre de se déconsidérer de la sorte ?

Contradiction. Le 4 mai, dans un billet, je notais que le GDT n’avait pas de fiche « fly-in fly-out ». La lacune a été corrigée depuis. Plus exactement, il n’y a toujours pas de fiche « fly-in fly-out » (« a method of employing people in remote areas » selon Wikipédia) mais une fiche « fly-in- fly-out worker » avec comme entrée principale « travailleur volant » et la note : « Travailleur navetteur est proposé pour remplacer le terme anglais fly-in fly-out worker. » Si c’est le terme travailleur navetteur qui est proposé, pourquoi ne pas l’avoir mis en entrée principale ?



Anglicisme. La même fiche « travailleur volant » contient un anglicisme : « le transport par navette peut s'effectuer selon des intervalles d'une journée, d'une semaine ou d'un mois, dépendant du rythme de rotation des équipes de travail ». Doit-on conseiller aux terminologues du GDT de consulter la Banque de dépannage linguistique du même Office québécois de la langue française ?

Lorsque l’on dit, par exemple : Il arrivera plus ou moins tard dépendant de l’heure de son départ, on se trouve à employer dépendant de comme une préposition, à la manière de l’anglais depending on. Or, on ne peut employer ce verbe ainsi conjugué comme une préposition en français. La locution dépendant de doit être remplacée, selon les contextes, par selon, suivant, en fonction de ou d’après. (BDL, article « dépendant de »)


Incompréhension de la notion de synonymie. Comme dans l’ancien GDT, les termes espadrille, basket et tennis sont présentés comme s’ils étaient des synonymes du terme chaussure de sport alors qu’ils ne sont que des variétés de chaussures de sport :
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Il me semble que cela fait beaucoup d’éléments critiquables dans ce nouveau GDT et, pourtant, je n’en suis encore qu’à la phase exploratoire.

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