Pensez ici à ce que promeuvent les adeptes du
refus de se faire vacciner ou de faire vacciner ses enfants ; aux
promoteurs de l’idée que la terre est plate ; à ces personnes persuadées
que des chemtrails existent ; et ainsi de suite. On a même créé un mot nouveau pour
désigner ces gens : on les appelle des dénialistes.
Normand
Baillargeon, « Précieuses connaissances
inflexibles », Le Devoir, 30 mars 2019
Je
dois dire que le titre de la dernière chronique de Normand Baillargeon me
laisse perplexe. Je me demande si le terme de connaissances inflexibles n’est
pas un calque de l’anglais. Une recherche rapide me montre qu’il s’agit d’un
concept de la psychologie cognitiviste récupéré en sciences de l’éducation. Ce
dernier fait n’a pas de quoi surprendre quand on connaît le jargonisme* qui
sévit dans ce domaine. Le terme de connaissances inflexibles signifie
simplement que ce que l’on apprend par cœur demeure le plus souvent
superficiel, c’est un savoir qu’on n’est pas capable de transposer dans un
domaine différent. C’est une évidence qui est connue depuis des siècles et cela
démontre une fois de plus que les sciences de l’éducation sont les seules
sciences où on n’a jamais fait aucune découverte**. À défaut, on jargonne. En tout
état de cause, le terme connaissances inflexibles n’est pas traité dans le Grand
Dictionnaire terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française
(OQLF).
Quant
à chemtrails, il s’agit d’un
mot-valise anglais (chemical trails)
entré dans cette langue dans les années 1990 (selon l’Oxford). Il n’est pas
traité dans le GDT. Voici ce qu’en dit Wikipédia :
La théorie conspirationniste des chemtrails [kɛmtreɪls] avance que certaines traînées blanches créées par le passage
des avions en vol sont composées de produits chimiques délibérément répandus en
haute altitude par diverses agences gouvernementales pour des raisons
dissimulées au grand public. Cette théorie est rejetée par la communauté
scientifique qui indique qu'il s'agit de simples traînées de condensation.
Troisième
néologisme relevé dans la chronique de Normand Baillargeon : dénialistes. On ne sera pas étonné d’apprendre
que le GDT n’a pas de fiche dénialisme.
Cherchons donc du côté de Wikipédia : « dans
la psychologie comportementale, le dénialisme est le choix de nier la réalité. »
Le terme est évidemment d’origine anglaise (denial).
Si on veut penser en français, on recourra au mot négationnisme (absent lui
aussi du GDT). Les mots dénialiste et
dénialisme sont attestés en français,
tant en France qu’au Québec, depuis plus d’une dizaine d’années mais ils n’ont
pas attiré l’attention des terminologues de l’OQLF. On les trouve dans le
magazine Québec Science en 2015. On pourrait
penser que l’OQLF devrait au minimum répertorier en priorité les néologismes
qui apparaissent dans cette revue.
________
*
Autre mot absent du GDT.
**
Je ne suis pas l’inventeur de cette formule. Je l’ai lue dans Le Devoir il y a plusieurs années (c’était
à l’époque où Lise Bissonnette était directrice) à l’occasion d’une polémique
sur les sciences de l’éducation.
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