« Dans ce jeu de poulet (chicken game), c’est l’UE qui a le gros bout du bâton et je ne vois pas
comment elle accepterait de faire des concessions sur le filet de
sécurité », avance Patrick Leblond.
– Magdaline Boutros, « Les misères de Boris Johnson », Le Devoir, 4
août 2019
Dans ce texte, qu’il est impossible de
commenter dans l’édition électronique du Devoir,
j’imagine que la journaliste a pris l’initiative de traduire elle-même l’expression
chicken game car je vois mal comment
son interlocuteur, tout professeur d’université qu’il est, pourrait réussir à
parler avec des parenthèses (il est vrai que, dans la langue des signes des
intellectuels ou prétendus tels, les coups de griffes donnés avec les index en
sont venus à signifier des guillemets).
La journaliste s’est contentée de la
solution facile, la traduction littérale.
Dans le
dictionnaire de Cambridge en ligne, on indique que to play chicken signifie « to play dangerous games in order to
discover who is the bravest ». Le Larousse
anglais-français traduit to chicken out
par « se dégonfler » et chicken
(informal) par « froussard ».
Est-ce utile d’ajouter que tous ces termes ne sont pas traités dans le Grand
Dictionnaire terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française
(OQLF) ? Je n'y ai d’ailleurs pas trouvé grand-chose sur la théorie
des jeux si ce n’est une fiche, « jeu à somme nulle » (il n’y a pas
de fiche « jeu à somme non nulle » et les nombreuses fiches
répétitives et à information plus que limitée « théorie des jeux »
mériteraient d’être réduites à une seule).
Il aurait fallu utiliser comme équivalent français
le jeu de la poule mouillée.
Explication fournie par Les Échos
(15 décembre 2010) :
L'étude des comportements humains, individuels ou en groupe, est
essentielle à la compréhension des mécanismes économiques de base. La théorie
des jeux fournit des cas, souvent imagés, très percutants.
La théorie des jeux est une des
branches de la science mathématique qui s’assigne pour sujet d’étude le
comportement humain en société, les interactions entre les membres de la
société et les intérêts qui les guident. Elle a fait beaucoup pour la compréhension
des mécanismes boursiers et du comportement des acteurs.
Dans cette théorie, les jeux se
classent en deux catégories : les jeux à somme nulle […], les jeux à somme
non-nulle. Le plus célèbre des jeux à somme non nulle est le « dilemme du
Prisonnier ». Le jeu de la poule mouillée est une version de ce jeu, qui
permet de comprendre bien des comportements économiques et leur traduction dans
les méthodes qu’adoptent certains États pour négocier ou gérer leurs relations
avec les autres.
Le principe est le suivant : deux
automobilistes sont sur une route à une seule voie roulant l’un vers l’autre.
S’ils ne cessent pas de rouler, ils vont se rentrer dedans. Dans ce cas, ils
ont tous les deux tout perdu. Mais ils peuvent aussi chercher à s’éviter. Il
suffit d’ailleurs qu’un seul d’entre eux décide de se mettre dans le fossé pour
que les deux s’évitent un accident très grave. Mais on voit bien que dans ce
cas, celui qui aura eu l’attitude la plus désinvolte, sera aussi bénéficiaire
que celui qui a pris l’initiative et assumé les coûts et les risques d’une
sortie de route.
Ce type qui sort de la route, c’est la
« Poule Mouillée ». Il a eu la trouille et a cherché à s’esquiver.
Celui qui est resté obstinément sur sa trajectoire, c’est celui « qui en
a… ».
Merci. J'ai souligné l'expression en la voyant ce matin dans le Devoir. Votre commentaire m'éclaire. Au revoir.
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