En
2006, j’ai dirigé une enquête pour évaluer l’utilisation de cette terminologie
chez les concessionnaires de voitures automobiles (vendeurs, commis aux pièces,
commis à la clientèle, mécaniciens) et chez les élèves de l’enseignement
technique. Une partie de ce questionnaire a été intégrée à une autre enquête,
celle-ci portant sur l’utilisation de certains termes standard et non standard
par les francophones des régions métropolitaines de recensement de Montréal et
de Québec. Voici les conclusions que j’ai tirées de ces enquêtes :
1. La
connaissance de la terminologie standard de l’automobile est en bonne partie
acquise. Plus de 60 % des répondants (72 % dans le cas des commis à
la clientèle et des commis aux pièces) connaissent les termes standard désignant
les parties de l’automobile dont on leur montrait l’image.
2. Le
deuxième constat concerne la fréquence d’utilisation de mots standard ou de
mots non standard. Les vendeurs et les commis à la clientèle sont plus nombreux
à déclarer utiliser plus les termes standard pour nommer des pièces ou des
composantes de l’automobile que les commis aux pièces, les mécaniciens ou les
élèves. Les travailleurs du secteur de l’automobile qui sont directement en
contact avec la clientèle portent donc une attention particulière aux termes
qu’ils emploient. En d’autres termes, les répondants se répartissent en deux
groupes bien typés : les commerciaux ou cols blancs, plus en contact avec
le public et déclarant utiliser dans une forte proportion les termes standard,
et les ouvriers ou cols bleus, qui conservent dans une plus forte proportion
l’utilisation d’un vocabulaire non standard comprenant plusieurs termes
anglais. Les réponses des élèves s’inscrivent dans cette dernière tendance.
3. Le
troisième constat concerne les résultats des élèves de l’enseignement
professionnel, presque toujours plus faibles que ceux des quatre catégories de
personnel travaillant chez les concessionnaires d’automobiles et même que ceux
du grand public. Pendant longtemps, en particulier dans les deux décennies qui
ont suivi l’adoption des grandes lois linguistiques québécoises (« loi
22 » en 1974 et « loi 101 » en 1977), on a cru, et on a même
entendu dans des colloques, que les élèves apprenaient à l’école la terminologie
française de leur discipline et que leur arrivée sur le marché du travail avait
pour conséquence, dans un grand nombre de cas, de les angliciser. Or, les
données de mon étude invalident cette affirmation. Avant même leur arrivée sur
le marché du travail, les élèves déclarent un comportement linguistique
analogue à celui des commis aux pièces et des mécaniciens, mais à un niveau
plus ou moins sensiblement inférieur. Il faudra s’interroger sur cette
situation : la pression des pairs à l’adolescence suffit-elle à provoquer
l’utilisation (du moins l’utilisation déclarée) d’un vocabulaire non standard,
pour une part anglicisé, alors que, par ailleurs, on connaît en bonne partie
les termes standard puisque nos données indiquent, chez les jeunes, un écart
marqué entre la connaissance et la préférence déclarée pour l’utilisation des
mots standard (environ 26 points d’écart) ?
Références
Le vocabulaire
français au travail : le cas de la terminologie de l’automobile, OQLF,2008.
Les Québécois et la
norme. L’évaluation par les Québécois de leurs usages linguistiques, OQLF, 2008.
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