Jean-François Lisée a
publié, dans Le Devoir du mercredi 10 avril 2024, une chronique
fracassante. Ou plutôt une chronique qui fracasse l’étude Langue de l’espace
public au Québec en 2002 de l’Office québécois de la langue française
(OQLF).
Il se demande « pourquoi
une étude dont le terrain a eu lieu au début 2022 n’est publiée qu’en mars
2024, alors que la situation démographique québécoise change à un rythme jamais
enregistré depuis, disons, la Conquête ». En effet, de 2022 à 2024, « la
progression du nombre d’immigrants temporaires est passée en deux ans de
quelque 290 000 à plus de 560 000. » Lisée croit que l’étude
aurait dû être publiée « en précisant que ses insuffisances étaient telles
qu’il ne fallait en tirer aucune conclusion sur le présent. Cela aurait évité
aux commentateurs peu versés en méthodologie de brandir ces chiffres pour
affirmer que la situation est ‘ stable ‘, voire que davantage
d’anglophones qu’avant adoptaient la langue de Félix à la ville. Le contraire
est indubitablement vrai. ».
Les arguments de Lisée sont
dirimants : vous pouvez en prendre connaissance en cliquant ici.
J’ajouterai quelques points
aux critiques de Jean-François Lisée.
Il s’agit d’un rapport
anonyme. Pas de préface de la présidente de l’OQLF. On ne dit même pas si le
rapport a été approuvé par le Comité de suivi de la situation linguistique au
Québec.
À la page 4 on peut
lire :
Les
personnes sondées étaient invitées à répondre au questionnaire en se basant sur
l’expérience qu’elles avaient vécue au cours des six mois précédant le sondage.
Or, lors de cette période de référence, étant donné la pandémie de COVID-19,
des mesures sanitaires étaient en vigueur, dont la fermeture des salles à
manger des restaurants et l’obligation de présenter un passeport vaccinal pour
fréquenter certains commerces. Les interactions au sein de l’espace public,
c’est-à-dire les interactions à l’extérieur de la maison avec des personnes
autres que les parents ou amis, étaient ainsi moins nombreuses et moins variées.
On veut étudier la langue
des interactions dans l’espace public dans une période où on admet qu’elles
étaient moins nombreuses et moins variées. Et on ose en plus comparer les
résultats à ceux de 2016, une période « normale ». On marche sur la
tête !
Enfin, il y a une innovation
méthodologique : la notion d’échantillon « assez représentatif »
(p. 43)! Avant, un échantillon était représentatif ou pas.
Ma conclusion est dans le
titre de ce billet.
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