Nous faisons face à une difficulté plus ancrée, plus
ardue à combattre au Québec : celle concernant le genre des mots
commençant par une voyelle ou par un h aspiré. Encore une fois,
écoutons-nous : “L’autobus, à s’en vient”, “L’ascenseur, à l’arrive”, “lls
la trouvent où, l’argent ?” Ou encore : “J’ai eu un idée”, “M’a te dire un affaire”,
“J’vas te raconter un histoire”, “Ça a été une belle événement”. On dit “une”
aéroport et “un” aérogare, alors que le mot port est masculin et le mot gare,
féminin. »
— Simon Durivage, «Pourquoi
avons-nous tant de difficulté avec le genre des mots?», Le Devoir, 25 juin 2016.
Ce
passage d’un texte de Simon Durivage a servi de prétexte à la tartine de Nadine
Vincent publiée dans Le Devoir le
30 juin et dans laquelle, au nom de ce qu’on appelle maintenant le « savoir
expert », elle discrédite l’opinion du citoyen Durivage : ce dernier
ne connaît pas l’histoire du français, il ignore qu’il y a cinq cents ans (un
demi-millénaire !) on hésitait sur le genre de certains mots (pas sur le
genre d’autobus ou d’ascenseur, tout de même !), pourquoi nous
enquiquine-t-il avec ses préjugés d’ignorant ? Comme je l’ai rappelé dans
le billet précédent, on avait servi la même médecine au compositeur, chanteur
et poète Georges Dor lorsque, dans trois essais, il s’était inquiété de la
langue des jeunes Québécois et de celle des médias : vous n’êtes pas
linguiste, vous n’avez pas voix au chapitre. C’est oublier que la langue est
d’abord la propriété des citoyens, pas une chasse gardée de spécialistes.
Le
texte de la linguiste a suscité quelques commentaires sur le site Internet du Devoir. J’en retiens deux, que je
retranscris tels quels :
Commentaire
de M. Jérôme Faivre :
Allez, une grosse effort !
Survol intéressant, mais ensuite ?
Que fait-on ? On continue à parler n'importe
comment, au hasard des « registres de langue » plus ou
moins familiers, et avec l'excuse de notre bien belle histoire si
particulière ?
Et cette orthographe française, si difficile :
à quoi bon se plier à ces vilaines règles arbitraires venues d'outre-mer ?
Question de registres, pour ne pas dire de classes sociales ?
L'orthographe a aussi une histoire.
Bref, on dirait ici un argumentaire encyclopédique
à l'usage d'enseignants un peu fainéants qui voudraient rester populaires
devant des élèves dissipés : le français comme on le parle nous-autres est
un magnifique produit de notre histoire, pi nous-autres on est de même et on
est fier. Joie et victoire contre l'oppression !
L'enseigner correctement et simplement, sans nous
dire constamment qu'elle est si particulière icitte, et arrêter le radotage
souvent entendu ailleurs sur sa difficulté, serait déjà un point de départ pour
la « respecter et éviter de la malmener encore plus », bref pour
pouvoir vraiment l'aimer.
M. Durivage avait soulevé un excellent point.
Et puis, un contre exemple : on dit un Jeep au
Québec ! :-)
Commentaire
de Mme Danielle Dufresne :
les jeunes
Bonjour,
Ce sujet autour de notre manière de parler le
français est toujours très d'actualité. J'ai remarqué, et je ne sais pas si
vous l'aurez remarqué aussi, mais les jeunes de 20 ans et moins qui vont à
l'école ne parlent pas le même français que celui des générations antérieures.
En fait, c'est l'accent qui a changé! Les sons «a» à la fin des mots sont moins
gras, les sons «ent» sont plus ouverts, les sons «i» sont moins é. J'écoute les
jeunes autour de moi, les petits-enfants et leurs amis et je suis surprise
d'entendre cela. Je ne juge pas si j'aime ou pas, mais je constate que ce n'est
pas le même niveau de parlure. Il est vrai que l'histoire de la langue est
importante pour comprendre comment on parle au Québec, mais il est certainement
encore plus vrai que l'enseignement est primordial et que la valorisation de
cette langue est full essentielle. Il faut que les autres membres de la
francophonie mondiale puissent nous comprendre sans pour autant nier cette
histoire et nos particularismes. Bon WE !
__________
* Adaptation d’un vers de Voltaire :
Non, il n’est rien que Nanine n’honore !
Malheureusement, il a une perte d’allitération dans mon adaptation.
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