Les anciens Canadiens sont souvent montrés sur
des gravures en habits du pays, vêtus de laine tissée, les pieds protégés par
des bottes sauves, couverts en hiver de leur capot
de chat ou de leur bougrine. Du vêtement traditionnel, on fit un outil
politique, par exemple lors des soulèvements de 1837-1838, alors que porter les
étoffes du pays et la ceinture fléchée tient d’une volonté bien affirmée d’affirmer
ses convictions. Loin de moi l’idée d’en revenir à la tuque d’un vieux de 1837, mais il n’en demeure pas moins que le vêtement, de
tout temps, affirme une position, une condition.
‑
Jean-François Nadeau, « Le paravent des vêtements », Le Devoir, 10 décembre 2018
L’article
de Jean-François Nadeau me servira de prétexte pour jeter un coup d’œil rapide
et partiel sur le traitement que réserve le Grand dictionnaire terminologique
(GDT) de l’Office québécois de la langue française (OQLF) à un aspect de la
culture traditionnelle du Québec. Sur les cinq termes mentionnés par le
journaliste, seuls deux apparaissent dans le GDT.
Terme
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Traité par le GDT ?
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Bottes sauves
|
Non
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bottes sauvages
|
Non
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Capot de chat
|
Non
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Bougrine
|
Non
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Ceinture fléchée
|
Oui
|
Tuque
|
Oui
|
Je
n’ai trouvé aucune attestation de bottes
sauves. Il doit plutôt s’agir de bottes
sauvages, terme très bien documenté dans notre ancienne littérature. L’abbé
Casgrain écrit (Une excursion à l’Île-aux-Coudres,
1885) : « L'habillement des hommes consistait dans un gilet d'étoffe
grise, un pantalon de toile du pays, et une paire de bottes sauvages, qui se rattachaient au jarret par une lanière ou
babiche de peau d'anguille ou de marsouin » (cité
dans le Trésor de la langue française au Québec). Dans un document de Louis
Morin, on trouve l’explication suivante : « Voici comment se
fabriquait une paire de bottes sauvages. On découpait, selon un modèle, un morceau de cuir dans le ‘coudrier’
pour faire le fond du soulier. Le ‘coudrier’ est la partie du dos de l'animal;
c'est là que le cuir est le plus résistant. Puis on plissait le devant avec de
la ‘babiche’ qui était une lisière de peau de mouton qu'on mouillait et qu'on
roulait sur son genou pour en faire une corde » (cité d’après le TLFQ).
Voyons
maintenant les deux termes traités par le GDT. Pour ceinture fléchée, terme qui n’a été traité qu’en 2013, nous avons
droit à un article encyclopédique qui nous amène jusque chez les Métis de l’Ouest
canadien. Quant à tuque, nous avons
droit à deux fiches contradictoires : celle de l’Office, qui privilégie
bien évidemment le québécisme tuque,
et celle des Éditions Québec Amérique, qui ne mentionne que le terme bonnet :
J’ai souvent noté les lacunes du GDT en
matière de néologie. Il semblerait que le traitement des termes québécois
vieillis, qui n’est évidemment pas la priorité de l’OQLF, ne loge pas à
meilleure enseigne.
________
* Louis Morin, Le calendrier folklorique de
Saint-François-de-la-Rivière-du-Sud, La Pocatière, La
Société historique de la Côte-du-Sud, 1972, 148 p. (Coll. Cahiers
d'Histoire, 5).
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