jeudi 7 mars 2019

Filer la métaphore


La saga SNC-Lavallin continue. Dans Le Devoir d’hier, la chroniqueuse Francine Pelletier prenait la défense inconditionnelle de Jody Wilson-Raybould. Texte prématuré car on savait que d’autres personnes, dont l’ancien conseiller principal du premier ministre Justin Trudeau, allaient témoigner le lendemain et vraisemblablement présenter une version des faits différente. La prudence aurait dû lui dicter de respecter le principe d’équité résumé dans la sentence latine audi et alteram partem, écouter aussi l’autre partie, avant de se prononcer de façon aussi catégorique. Le Devoir de ce matin titre d'ailleurs : « Butts oppose sa vérité à celle de Wilson-Raybould ».


Je n’entends pas discuter le fond de la chronique de Francine Pelletier. D’ailleurs j’avais pris l’habitude de ne la lire qu’en diagonale tant ses partis pris m’horripilent jusqu’à ce qu’une lectrice de mon blog attire mon attention sur les qualités (?) stylistiques de la prose de la chroniqueuse. Buffon disait que le style, c’est l’homme. Eh bien, c’est aussi la femme.


Dans son texte du 6 mars, Francine Pelletier écrit: « ses appuis fonderont au Canada anglais ». Ses appuis fonderont quoi? On voit ici toute la limite des logiciels de correction, incapables qu’ils sont de faire la différence entre les verbes fonder et fondre. Ce matin, la faute, que j’ai signalée dans un commentaire, n’a toujours pas été corrigée dans l’édition électronique du quotidien.


La chroniqueuse parle aussi du « supplice médiéval qui consistait à écarteler un prisonnier, parfois jusqu’à la mort ». Écarteler, c'est « déchirer, arracher les membres d'un supplicié en les soumettant généralement aux tractions contraires de quatre chevaux » (Trésor de la langue française). Parfois jusqu'à la mort? On devait être bien costaud au Moyen Âge pour sortir vivant de ce supplice. On lit aussi que Justin Trudeau est assis sur deux failles : c'est ce que j'appellerais filer la métaphore de l'écartèlement (à moins qu'il ne s'agisse de l'empalement?).


J’en conclus pour ma part que la chroniqueuse a précipité la rédaction de son texte car si elle avait attendu et pris connaissance des points de vue des autres témoins, elle aurait été écartelée entre ces opinions et celle de Jody Wilson-Raybould, risque qu’elle n’a pas osé prendre même si elle croit qu’on peut parfois sortir vivant du supplice de l’écartèlement.


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