J’ai
rappelé, dans un billet récent, que l’Office (alors pas encore québécois) de la
langue française avait créé dans les années 1970 une équipe de néologie dont la
mission était de détecter le plus tôt possible les néologismes apparaissant en
anglo-américain pour leur trouver des équivalents français. Le mot coffice n’aurait pas échappé à leur
attention, ce qui est malheureusement le cas du Grand Dictionnaire
terminologique :
Le
coffice a fait l’objet récemment d’un
article dans Le Monde, repris dans Le Devoir du 16 janvier :
Le
«coffice», ou mon bureau au bistrot
Entre le café et le lieu de travail, le concept
fleurit dans le monde
Bosser au troquet? Une habitude, désormais,
pour les travailleurs nomades. À tel point que fleurissent les
« coffices », un compromis entre le café et le bureau.
[…]
Surfant sur la tendance nomade des travailleurs,
une nouvelle génération d’établissements, les cafés-bureaux, commence à ouvrir
en France. L’idée serait née en Corée, avant de se développer aux États-Unis où
les « coffices », contraction de « coffee » et « office »,
font fureur.
Dans ces lieux, on ne facture pas les
consommations, mais le temps passé. À l’intérieur, accès wi-fi gratuit,
boissons et encas à volonté.
C’est aussi en partant de son besoin personnel que
Leonid Goncharov, 26 ans, a fondé le premier Anticafé à Paris, en
2013. Deux ans après, trois autres établissements ont déjà vu le jour, dont un
à Rome.
Pour 3 à 5 euros l’heure, selon la formule
choisie, membre régulier ou visiteur, le concept séduit une génération
ultraconnectée qui y va pour travailler mais aussi pour trouver du lien social,
le tout dans une ambiance décontractée — plus « barbe de trois jours et
bonnet » que « costume-cravate ».
Comme j’ai bien
connu l’initiateur de l’équipe de néologie à l’Office, je crois bien qu’il
aurait fait valoir que travailler au café faisant partie de la tradition
intellectuelle de la France il est par conséquent inutile de trouver un mot
nouveau.
Sartre en plein travail au Café de Flore |
Le mot coffice est d’autant plus inutile en
français que de mauvais esprits pourraient y voir un mot-valise formé de con et office.
* * *
Tant
qu’à y être, et puisqu'il n'y a plus guère de « mémoire institutionnelle » à l’Office (québécois) de la langue française, je préciserai que l’initiateur des travaux de terminologie a été l’écrivain Gilles Leclerc (Le Journal d’un inquisiteur, 1960).
Son
bras droit était Stéphane Golmann. Ce dernier a participé au débarquement
allié en Afrique du Nord puis il s’est fait connaître comme auteur-compositeur-interprète
à la grande époque de Saint-Germain-des-Prés.
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