J’ai
lu récemment sur le site de RTL un petit article sur les mots de l’année 2015.
Pas sur les nouveaux mots mais sur les mots les plus significatifs de cet annus horribilis (expression naguère
employée par Babette*) : carnage,
massacre, guerre, violence, etc. Parmi ces mots, il y avait tout de même
quelques néologismes : ubérisation,
cyber-djihadisme, transition climatique, justice climatique, etc. Néologismes
qui n’ont pas encore été traités par les terminologues du Grand Dictionnaire
terminologique (GDT) de l’Office québécois de la langue française (OQLF).
L’équipe
responsable des dictionnaires Oxford a révélé en novembre dernier que le mot de
l’année n’en était pas tout à fait un : un emoji, c’est-à-dire un pictogramme ou « smiley »,
représentant une figure avec des larmes de joie.
Un smiley, c’est ce que l’OQLF
appelle une « binette » et, en France, la Commission générale de
terminologie une « frimousse ». La Commission prend la peine d’ajouter :
« Le terme ‘ binette ’ est recommandé au Québec. ‘ Frimousse ’
doit être préféré à ‘ binette ’ ». Sans autre explication. Vive
la coopération francophone !
Le
mot emoji, largement mentionné dans
les médias anglophones en novembre dernier, n’apparaît toujours pas dans le
GDT. Dire qu’il y a encore des naïfs qui croient que l’une des missions de l’OQLF
est de fournir des équivalents français aux néologismes anglais (bon, disons nippon dans le cas présent). On a même
pensé à une époque que le Québec, étant aux avant-postes de la francophonie,
avait pour rôle de proposer au monde francophone des équivalents aux néologismes
américains, ce qui avait entraîné dans les années 1970 la création d’une équipe
de néologie à l’Office (pas encore québécois) de la langue française. Époque
révolue. Pour savoir aujourd’hui ce que signifie emoji, il vaut mieux se fier à Wikipédia :
Emoji (japonais : 絵文字 ou えもじ, prononcé [emodʑi]) est le terme japonais pour désigner les émoticônes utilisées
dans les messages électroniques et les pages web japonaises, qui se répandent
maintenant dans le monde entier. Signifiant à l'origine pictogramme, le mot emoji signifie littéralement « image » (e) + « lettre » (moji). Ces caractères sont
utilisés de la même façon que les émoticônes ASCII,
mais un plus grand nombre sont définis, et les icônes sont standardisées et
intégrées aux appareils.
L’équipe
d’Oxford avait établi une liste des dix mots de l’année 2015. Les neuf autres
mots étaient les suivants :
ad blocker, noun: A piece of software designed to prevent
advertisements from appearing on a web page.
Brexit, noun: A term for the potential or hypothetical departure
of the United Kingdom from the European Union, from British + exit.
Dark Web, noun: The part of the World Wide Web that is only
accessible by means of special software, allowing users and website operators
to remain anonymous or untraceable.
on fleek, adjectival
phrase: Extremely
good, attractive, or stylish.
lumbersexual, noun: A young urban man who cultivates an appearance
and style of dress (typified by a beard and check shirt) suggestive of a rugged
outdoor lifestyle.
refugee, noun: A person who has been forced to leave their country in
order to escape war, persecution, or natural disaster.
sharing
economy, noun: An economic system in which assets or services are
shared between private individuals, either for free or for a fee, typically by
means of the Internet.
they
(singular), pronoun: Used to refer to a person of unspecified sex.
Le
dernier mot relève de la grammaire anglaise et n’a pas à être pris en compte
dans le GDT. Six mots n’ont pas d’équivalent dans le GDT. Seuls sont traités refugee et dark Web. Mais même un mot comme refugee reçoit un traitement des plus sommaires, une simple
équivalence refugee = réfugié, sans définition. Le GDT a
pourtant les termes réfugié climatique,
de la mer, de l’environnement, etc. Comme le travail terminologique est
visiblement taylorisé, avec une répartition des tâches qui sépare la conception
de l’exécution, personne ne s’est avisé qu’il faudrait peut-être
commencer par refaire la vieille fiche réfugié
(datant de 1978). Finalement, seul le mot dark
Web fait l’objet d’une fiche acceptable avec ses équivalents : Web invisible, Web caché, Web profond,
Internet invisible, Net invisible. Mais pense-t-on vraiment aider les
usagers et orienter l’usage en multipliant les équivalents français ?
Au
final, la néologie apparaît comme le parent pauvre du GDT.
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* Surnom cher à ma feue collègue Thérèse, dont ce serait l'anniversaire aujourd'hui.
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* Surnom cher à ma feue collègue Thérèse, dont ce serait l'anniversaire aujourd'hui.
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