Changement de venue = dépaysement
En
2011, pour fêter le cinquantième anniversaire de l’Office (québécois) de la
langue française, j’avais fourni les matériaux pour combler une lacune du Grand
Dictionnaire terminologique (GDT). En effet, celui-ci n’avait pas relevé le
calque changement de venue,
expression qui signifie qu’un procès sera jugé dans un autre district
judiciaire. Il aura fallu huit ans pour que l’OQLF finisse par accepter ce
cadeau et mette en ligne une fiche « dépaysement », équivalent
français standard de change of venue.
Malheureusement
la fiche s’accompagne d’une note qui appelle deux réserves :
L'emprunt changement de
venue est déconseillé parce qu'il ne s'intègre pas au système linguistique
du français. En effet, le mot venue, en français, a le sens d'« action,
fait de venir », alors qu'en anglais, il désigne plutôt un lieu de
rencontre ou de réunion. L'emprunt changement
de venue est par ailleurs peu fréquemment employé au Québec.
Le
calque changement de venue, comme
tous les calques d’ailleurs, s’intègre parfaitement au système linguistique du
français, c’est ce qu’on ne parvient pas à comprendre à l’OQLF. Il suffisait
simplement de signaler que le mot venue
n’a pas en français le sens qu’il a en anglais : est-ce trop difficile à
dire ?
Par
ailleurs, changement de venue est un
terme technique. Quand on fait de la lexicographie générale comme on le fait à
l’OQLF sous couvert de faire de la terminologie, il est normal qu’on trouve que
ce terme est peu fréquent au Québec. Mais quand on prend la peine de faire la terminologie d’un domaine particulier, dans ce cas-ci le droit, on se rend
compte que le calque en question est autrement plus fréquent, comme je l’ai
montré dans mon billet de 2011.
En tout état de cause, il était si
peu fréquent, n’est-ce pas, qu’il figurait déjà dans Le parler populaire des
Canadiens français de
Narcisse–Eutrope Dionne (1909).
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