mardi 26 avril 2011

Arguments pour et contre Lionel Meney


Dans le dernier numéro de la revue Argument, Patrick Moreau présente un dossier intitulé malencontreusement « Les Québécois parlent-ils un bon français ? Discussion autour du livre de Lionel Meney ». Intitulé malencontreux parce que le livre de Lionel Meney ne concerne pas que la langue parlée.
Quatre lecteurs de Main basse sur la langue nous livrent leurs réflexions puis Lionel Meney leur répond.

Pour vous inciter à lire ce dossier, j’accompagnerai la liste des articles de quelques extraits.


Marie-Andrée Lamontagne,
« Sur un certain rêve »


« Je le dis d’emblée : je souscris à la thèse de Meney, en y ajoutant mon grain de sel. La promotion d’une norme québécoise pour la langue française parlée et écrite au Québec est une solution facile à la portée d’un public ignorant ou fragilisé (même si, ignorants, tous les aménagistes ou endogénistes ne le sont pas au même degré), à un moment où l’éducation – au Québec comme ailleurs en Occident – a besoin de réintroduire exigences et rigueur, de réhabiliter la culture générale et historique. Au Québec, la promotion d’une norme québécoise est l’ennemi intérieur du français que ne veulent pas voir ses plus ardents défenseurs, aux yeux rivés sur l’anglais, volontiers donneurs de leçons à une France par eux jugée trop anglophile. Elle n’est pas affirmation de soi mais repli sur soi, ghetto volontaire. » (p. 147)


« Pinaillage lexical, charge de Croisés contre les anglicismes les plus évidents et ignorance des plus pernicieux, le mot ‘courriel’ brandi comme un trophée : il doit y avoir mieux, non ? » (p. 152)


André Braën, « Un français identitaire, égalitaire et utilitaire »


« […] le français peine à devenir véritablement la langue commune de l’ensemble de la population québécoise, en particulier à Montréal. » (p. 153)


« À notre avis, le modèle de référence linguistique peut être aussi bien la terminologie employée en France puisque le code civil y puise ses origines que les particularismes québécois en coexistence depuis plus de deux siècles avec le droit anglais. » (p. 158)


« […] c’est finalement un juste équilibre entre l’identité québécoise et son rattachement à la francophonie internationale qui est valorisé » dans l’ouvrage de Meney (p. 159).


Claude Jasmin, « Ma machine gronde dans les virages ! »
[Claude Jasmin est, rappelons-le, l’auteur de Pleure pas Germaine, roman en joual (1965).]




[Au sujet de Parti Pris et de l’écriture en joual :] « Au départ, aucun d’entre nous (à part Léandre Bergeron) ne songeait que notre ‘jargon’ devait se pérenniser.» (p. 162)


« J’ai subi un choc violent quand je fis un premier séjour en France. Ce fut la découverte accentuée que nous parlions un charabia. […] À un vaste congrès de professeurs de français à Trois-Rivières, en 1980, il y eut de vives protestations dans la salle quand, au micro, j’ai voulu tenir ces propos. Indignée, une jeune enseignante, rouge de colère, vint au micro de la salle pour me crier : ‘Jasmin, vous devriez avoir honte d’oser renier votre merveilleuse, votre magnifique Germaine!’ » (p. 163-164)



Le seul article qui attaque les thèses de Lionel Meney est celui de Claude Poirier. Les citations que j’en fais ne peuvent qu’en donner une faible idée. Il faut donc le lire au complet de même que la réponse, point par point, de Lionel Meney.

Claude Poirier, « Quand une théorie est bâtie comme un château de cartes… »


« […] je n’appartiens pas au groupe des aménagistes, formé d’universitaires dont la carrière, ou une partie de celle-ci, s’est déroulée au sein des organismes linguistiques du gouvernement du Québec. […] je ne crois pas à leur démarche visant à circonscrire un français québécois standard, notion qu’ils ont, à mon avis, discréditée à jamais. » (p. 166)


« On peut donc affirmer qu’il existe au Québec un usage soigné du français qui ne coïncide pas tout à fait avec le modèle du français de référence, mieux connu en Europe. » (p. 170)


Lionel Meney, « Pour une théorie explicative globale du marché linguistique québécois »


« On doit […] comprendre et juger mes idées par rapport […] au modèle de langue qu’on doit suivre, en situation de communication surveillée, quand on veut parler ou écrire correctement. » (p. 174)


« Dans mon livre, je dénonce la mainmise par un groupe d’universitaires et de fonctionnaires endogénistes sur le domaine de la langue pour mener une politique allant à l’encontre du désir de la majorité des Québécois. » (p. 175)


« En conclusion, malgré la distance qui semble nous séparer, nous partageons, Claude Poirier et moi, plusieurs points communs. […] Enfin, comme moi, comme Conrad Ouellon et le CSLF, il reconnaît l’existence d’une norme internationale commune, y compris dans l’enseignement de la langue. Il l’appelle ‘français de référence’, je l’appelle ‘français standard international’. » (pp. 191-192)

Les articles de ce dossier soulèvent plusieurs questions intéressantes dont je traiterai probablement dans des billets ultérieurs.

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