Apportons maintenant quelques illustrations qui montrent que le québécois standard – la langue des Québécois « quand ils écrivent bien[1] » selon une définition aménageuse – est en fait un calque de l’anglais. Comme nous invite à le faire cette définition plus qu’approximative, nous laisserons de côté la langue parlée. Les exemples de calques surabondent : les travaux seront complétés (= terminés), ceci complète notre téléjournal, rencontrer les exigences (= satisfaire aux), citoyen corporatif (entreprise citoyenne) , opérer une compagnie (= exploiter) , sauver du temps ( = gagner) , sauver de l’argent (= économiser), meilleurs vendeurs (= best-sellers, meilleures ventes), seringues et couches disposables (= jetables), cirer les skis (= farter), déductible employé comme nom dans le domaine des assurances (= franchise), etc.
« […] rappelons que Cart@gène a été initié et continue d'opérer en tant qu'infrastructure de recherche de l'Université de Montréal. » (Le Devoir, « Libre opinion - Cart@gène, un choix de société », 6 janvier 2010) [… was initiated… operate…]
« Ils vont devoir faire la ligne au chômage » (Radio-Canada, 8 décembre 2009) [to wait in line, to stand in line, faire la queue]
« On a adressé cette question » (TVA Nouvelles 17 h, 25 janvier 2010)
« On met décidément trop l’accent sur la date du référendum. Logiquement, il devrait être appelé quand les souverainistes auront repris le pouvoir, seront prêts et que le moment sera propice » (Jacques Parizeau dans Le Québécois, cité par Michel David, Le Devoir, 14 septembre 2010, p. A3) [to call an election = déclencher une élection].
La chaîne V, anciennement TQS, diffuse depuis des années ce message sans que personne, semble-t-il, le trouve incompréhensible : « Ce film comporte des scènes de violence pouvant ne pas convenir à un jeune public. Le jugement des parents est conseillé. » Le jugement des parents est conseillé, cela ne veut rien dire en français. Il faudrait dire : on conseille aux parents de faire preuve de jugement.
Comme l'avait fait remarquer à l'époque le regretté Louis-Paul Béguin, le calque « mon nom est X » (je m’appelle X) a servi de modèle au slogan fédéraliste du référendum de 1980 « Mon non est québécois » : on ne pouvait mieux illustrer le sort réservé au français au Canada.
En fait, on pourrait citer par pages entières le Colpron, le Multi-dictionnaire de Marie-Éva de Villers et le Dictionnaire québécois français de Lionel Meney.
(À SUIVRE)
[1] Cité d’après Diane Lamonde, Anatomie d’un joual de parade, Montréal, Varia, 2004.
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